Patrick ROBO
juin 2003
http://probo.free.fr/ - patrick.robo@laposte.net
- FICHE
TECHNIQUE -
Désignation : Groupe de Formation à
l'Analyse de Pratiques Professionnelles (GFAPP)
Conditions :
Formation en groupe au "savoir analyser" (a) et à l'animation de groupes d'analyse (b), à partir de l'analyse d'un récit de situation professionnelle vécue par un participant et posant question, puis par l'analyse collective du protocole et de sa mise en œuvre avec production d'écrits mutualisables relatifs à ce dispositif de formation. Formation sur la base d'un minimum de six séances étalées sur une année. Ce dispositif s'appuie sur trois principes incontournables : le volontariat, l'assiduité et la confidentialité (ce qui est dit à propos de la situation évoquée n'appartient qu'aux participants à l'analyse menée à partir de cette situation). Il s'appuie également sur un postulat : nul ne peut être animateur d'un G(F)APP[1] s'il n'a été lui-même mis en situation d'analyser sa propre pratique professionnelle en groupe.
Matériau :
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Définition de l’objet support de l’analyse
:
a) Le
premier support est la pratique d'un professionnel de l'éducation explorée et
analysée à partir du récit d'une situation vécue exposée par un acteur
volontaire et permettant d'analyser une pratique dans l'objectif de développer
la méta-compétence qu'est le "savoir analyser".
b) Le
deuxième support de l'analyse est le vécu de la séance ainsi que le protocole
utilisé pour l'analyse d'une pratique professionnelle, et ce dans l'objectif de
formation à l'animation de G(F)APP.
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Forme des données :
a) Récit différé oral (préparé ou non) ou écrit (rédigé en amont de la séance d'analyse dans le but d'exposition au groupe).
b) Observations et commentaires sur la mise en œuvre du protocole, sur l'animation et le déroulement de la séance.
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Nature des données :
a) Par situation professionnelle il s'agit de tout acte, activité, action vécus dans le cadre professionnel, en présence d'élèves, de stagiaires, de formateurs, de pairs, de partenaires, de parents, etc. au cours desquels des faits, des phénomènes, des relations, des représentations posent question voire problème.
b) Par protocole on entend les modalités employées pour procéder à l'analyse d'une pratique (différentes phases, règles de fonctionnement, partition du temps, etc.). Les observations et commentaires sont ceux des participants et éventuellement d'un observateur identifié en début de séance.
Analyse :
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Objet sur lequel porte l’analyse :
a) Pour la formation au "savoir analyser" l'analyse porte sur l'ensemble des facteurs, paramètres, acteurs ayant eu ou non une incidence sur la situation évoquée et par delà sur la pratique professionnelle d'un acteur impliqué dans cette situation. L'analyse est circonscrite au temps événementiel de la situation décrite et sur son amont ; jamais sur son après (le but est de comprendre pourquoi cette situation a pu se produire ainsi et non de chercher à la résoudre par l'apport de solutions).
b) Pour la formation à l'animation d'un G(F)APP, l'analyse porte sur l'ensemble des éléments (dispositif général, protocole, animation et compétences nécessaires, organisation spatio-temporelle, modalités d'analyse…) permettant de développer, en groupe, le "savoir analyser". Il est à noter que le GFAPP n'étant pas une méthode, ce temps de méta-analyse contribue à son évolution dans une quête de plus d'efficience.
Modalités d’analyse :
a)
L'analyse d'une pratique professionnelle à partir d'une
situation vécue se fait à partir d'un récit libre de la part d'un volontaire,
suivi d'une phase de questionnement dans le but de recueillir par une approche
multiréférentielle un maximum d'informations pouvant expliquer le pourquoi de
la pratique et ce dans une perspective de compréhension. Vient ensuite une
phase d'émission d'hypothèses explicatives (pourquoi la situation a pu se
produire ainsi) et éventuellement une recherche du modifiable uniquement au
niveau de l'amont de la situation exposée, toujours dans un cadre
multiréférentiel. L'analyse se clôt par un temps d'expression laissé à la liberté de l'exposant.
Cette analyse s'inscrit dans une dimension à la fois clinique et
psychosociologique. Elle relève d'une approche compréhensive et qualitative.
b) L'analyse
(dite méta-analyse) du protocole et de son fonctionnement se fait par la confrontation
d'observations, de remarques, d'apports de savoirs (pratique et/ou théoriques)
sur les divers éléments effecteurs. Elle peut porter sur différents objets ou
être centrée sur l'un d'entre eux (par exemple : Le choix de l'exposant) et
s'inscrit dans un processus à la fois historique et évolutif. De plus elle est
axée sur la production d'écrits co-réflexifs et mutualisables (ne portant pas
sur les situations évoquées).
Cette analyse s'inscrit dans une dimension à la fois déontologique, technique,
phénoménologique, organisationnelle et institutionnelle.
Formes d’analyse :
a) Pour le développement du "savoir analyser", l'analyse est en même temps individuelle (chacun se construit ses interprétations, sa compréhension de ce qui est analysé) et collective, puisque menée en groupe sous la responsabilité première d'un animateur (pouvant ou non être un formateur).
b) Pour
ce qui est de la formation à l'animation d'un G(F)APP, l'analyse est collective
sous la responsabilité d'un animateur, différent de celui qui a conduit le
temps de l'analyse de pratique professionnelle et qui peut ou non être le
formateur responsable du GFAPP.
Exploitation en formation
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Activité de l'exposant :
a) Exposition libre d'un vécu professionnel personnel, puis réponse (s'il le souhaite) à des questions d'élucidation, puis écoute silencieuse des hypothèses explicatives et d'éventuels modifiables ; enfin clôture de la séance d'analyse de sa pratique par une expression libre.
b) Aucune activité spécifique
-
Activité de l'animateur :
a) Installe le protocole, fait procéder au choix d'un exposant (généralement de manière négociée), anime le temps d'analyse de la pratique (gestion du temps, distribution de la parole, respect du protocole et des règles de fonctionnement, garantie de la sécurité des participants, guidance neutre dans l'approche multiréférentielle).
b) Intervient éventuellement dans la méta-analyse.
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Activité des participants :
a) Ecoutent silencieusement l'exposé de la situation, posent des questions d'élucidation, émettent des hypothèses explicatives ou de modifiable sur l'amont, écoutent à nouveau silencieusement l'exposant qui clôt le temps d'analyse de sa pratique. Dans toute la mesure de leur possible, ils évitent de donner des conseils (même déguisés en questions ou hypothèses) ; ils s'interdisent tout jugement. Recherche permanente de neutralité dans une posture empathique.
b) Contribuent avec l'animateur du temps d'analyse de la pratique à la méta-analyse et à la formation à l'animation ainsi qu'à l'évolution du dispositif GFAPP et de son protocole. A noter que l'un des participants prend l'animation de ce temps de formation et que l'un d'entre eux, s'il a été investi du rôle d'observateur, fait alors état de ses observations.
Formes d’analyse dérivées
Des professionnels de l'éducation ayant participé à un G(F)APP (et non simplement à la présentation de ce dispositif de formation accompagnante) disent avoir utilisé :
- le protocole (excepté la dernière phase de méta-analyse) pour gérer des situations professionnelles, voire personnelles problématiques ; protocole utilisé en collectif ou dans une relation duelle avec un autre membre du G(F)APP, hors les temps de réunion du groupe ;
- le principe (exposé, questions, hypothèses) dans le cadre d'entretiens suite à des observations de pratiques (par exemple visites formatives de PE2 en stage).
Historique du dispositif[2]
Le GFAPP, ce dispositif de formation-action au service des métiers de l'humain, s'est progressivement mis en place depuis une dizaine d'années, d'abord au niveau de conseillers pédagogiques de circonscription de l'Hérault. Il est le fruit d'un parcours[3] inspiré de divers concepts et approches d'analyses de pratiques existants, croisés avec des apports de la Pédagogie Institutionnelle[4] : les Groupes d'Entraînement à l'Analyse de Situations Educatives[5] (GEASE), les Groupes Balint enseignants[6], les Groupes d'Approfondissement Personnel[7] (GAP), les Groupes de Soutien au Soutien[8] (GSAS).
Références principales
Le savoir analyser :
FERRY G., Le trajet de la formation, les enseignants entre la théorie et la pratique, Paris, Dunod, 1983.
ALTET M., La formation professionnelle des enseignants, Paris, PUF, 1994.
La multiréférentialité :
ARDOINO J., «L'approche multiréférentielle en formation et en sciences de l'éducation», Pratiques de formation (Analyse), Paris, Université Paris VIII, n° 25-26/1993.
L'approche compréhensive :
KAUFMANN J.-C., L'entretien compréhensif, Paris, Nathan
université, 1996.
DILTHEY W., Introduction aux sciences de l'esprit
(1883), Paris, PUF, 1942.
DURKHEIM
E., Les règles de la méthode sociologique, (1895), Paris, Flammarion,
coll. Champs, 1988.
L'approche clinique :
Cifali M., Le lien éducatif : contre-jour
psychanalytique, Paris, PUF, 1994
La pédagogie
institutionnelle :
OURY F. et VASQUEZ A., Vers la pédagogie institutionnelle, Paris, Matrice, 1998.
Le soutien au soutien :
LEVINE J., MOLL J., Je est un autre, Pour un dialogue pédagogie-psychanalyse, Paris, E.S.F., 2000.
Les groupes Balint
enseignant :
BALINT M., Le médecin, son malade et la maladie, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 1960.
IMBERT F., Le
groupe Balint, un dispositif pour un "métier impossible" : enseigner in BLANCHARD-LAVILLE
C. et FABLET D., L'analyse des pratiques
professionnelles, Paris, L'Harmattan, 2000.
Les Groupes d'Entraînement à
l'Analyse de Situations Educatives :
ETIENNE, R., FUMAT, Y., VINCENS, Cl. (à paraître en septembre 2003). Analyser les situations éducatives, ESF, Paris.
Les GFAPP :
ROBO P., «L'analyse de pratiques professionnelles : un dispositif de formation accompagnante», dans Vie pédagogique, n° 122 avec errata dans le n° 123, Ministère de l'Éducation du Québec, p 7-10 / 57, 2002.
ROBO P., «L'analyse des pratiques professionnelles : éclairages» dans Le nouvel éducateur, n° 136, p. 28-34, 2002.
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