octobre 1997
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La
Pédagogie FREINET, la Pédagogie Institutionnelle, la Pédagogie Différenciée… ?
"Le choix des méthodes et démarches pédagogiques
relève d'abord de l’initiative et de la responsabilité des maîtres."[1]
Fort
de cette liberté officielle, chaque enseignant est invité à chercher dans le
domaine pédagogique ce qui, d’une part, peut correspondre le plus à ses
orientations philosophiques, à sa “personnalité”, et, d’autre part, ce qui
présenterait le “meilleur rapport qualité / prix” si l’on utilise ici un terme
emprunté à l’économie.
Aujourd’hui,
dans certaines cours de récréation, dans des stages, colloques, ou lors de
discussions regroupant des enseignants, l’on peut entendre parler,
s’interroger, à mots couverts ou très explicitement, à propos de méthodes,
techniques, pratiques, démarches... pédagogiques de type “différenciées”,
“FREINET”, “institutionnelles”...
Et
l’on se rend compte, à l’écoute, qu’une certaine confusion existe parfois entre
ces terminologies ou appellations d’origine.
Essayons
donc de cerner ce que représentent ces pratiques pédagogiques, ou plutôt ces
praxis au sens où le définit Francis IMBERT[2] : “Il nous paraît indispensable de ce
donner ce concept de praxis pris
dans son sens supérieur, celui d’une visée de l’autonomie qui en appelle à une
transformation de la réalité et non à la pure contemplation ou aux effusions du
cœur, et de le faire jouer avec celui de pratique
compris comme production - au sens industriel du terme - afin de pouvoir
éclairer, par ce jeu de différences, ce qu’il en est du faire dans le champ scolaire. Distinguer praxis et pratique permet
un repérage des caractéristiques de l’entreprise pédagogique. Y a-t-il place ou
non pour une praxis à l’école, ou n’est-ce pas plutôt et le plus souvent de
simples pratiques qui s’y développent, à savoir un faire qui occupe du temps et
de l’espace, vise un effet, produit un objet (des apprentissages, du savoir) et
un sujet-objet (un écolier qui reçoit ce savoir, subit ces apprentissages),
mais en aucun cas n’est porteur d’une visée d’autonomie ?”
La Pédagogie Institutionnelle
Voici comment la définissent Aïda VASQUEZ
et Fernand OURY[3] : La
Pédagogie Institutionnelle est un ensemble de techniques, d’organisations, de
méthodes de travail, d’institutions internes, nées de la praxis de classes
actives. Elle place enfant et adultes dans des situations nouvelles et variées
qui requièrent de chacun engagement personnel, initiative, action, continuité.
Ces situations souvent anxiogènes (...) débouchent naturellement sur des
conflits (...). De là cette nécessité d’utiliser, outre des outils matériels et
des techniques pédagogiques, des outils conceptuels et des institutions
sociales internes capables de résoudre ces conflits par la facilitation
permanente des échanges matériels, affectifs et verbaux.
La
Pédagogie Institutionnelle peut se définir :
•
d’un point de vue statique : comme la somme des moyens employés pour assurer
les activités et les échanges de tous ordres, dans et hors de la classe ;
•
d’un point de vue dynamique, comme un courant de transformation du travail à
l’intérieur de l’école.
Les
changements techniques, les relations interindividuelles et de groupes à des
niveaux conscients et inconscients, la structuration du milieu, créent des
situations qui, grâce à des institutions variées et variables favorisent la
communication et les échanges.
Dans
la classe (nous préférerions pouvoir écrire dans l’école) devenue lieu
d’activité et d’échanges, savoir parler, comprendre, décider, etc. savoir lire,
écrire, compter, deviennent des nécessités. Ce nouveau milieu favorise, outre
les apprentissages scolaires, l’évolution affective et le développement intellectuel
des enfants et des adultes.
(...)
la caractéristique de la Pédagogie Institutionnelle : tendre à remplacer
l’action permanente et l’intervention du maître par un système d’activités, de
médiations diverses, d’institutions, qui assurent d’une façon continue
l’obligation et la réciprocité des échanges, dans et hors du groupe.”
Aïda VASQUEZ et Fernand OURY précisent
dans leur deuxième livre[4] : “nous
estimons que l’étude du milieu éducatif comporte nécessairement trois
dimensions[5]
au moins :
•
Matérialiste : le matériel, les techniques qui commandent les types
d’organisation déterminent les activités, les situations, les relations ;
•
Sociologique : la classe, groupe et ensemble de groupes, fait partie d’autres
ensembles qui la déterminent en partie ;
•
Psychanalytique : reconnu ou nié, l’inconscient est dans la classe et parle...
Mieux vaut l’entendre que le subir.
Jacques PAIN[6] écrit : “Ce sont aussi trois grands référents :
•
Célestin FREINET
•
Sigmund FREUD (et l’école freudienne de Paris)
•
Kurt LEWIN.
La
nomination de la P.I.[7]
est le fait de Jean OURY[8].
(...) Il s’agit d’une pédagogie “institutionnelle”, c’est-à-dire d’une
pédagogie qui déchiffre à la fois l’enseignement, mais aussi le “savoir”, comme
un champ d’instances concrètes, étroitement articulées par la règle de
l’Échange, comme un lieu structuré par “l’institution”. Et l’institution ne va
pas sans “l’institutionnalisation” quotidienne.”
Pour compléter cette présentation, citons
Roger DELDIME et Richard DEMOULIN[9] : ”
La Pédagogie Institutionnelle se caractérise par la médiation qui peut-être un
objet (outil ou but) ou une personne, ou une institution, mais qui se révèle
toujours être plus qu’un objet ou une personne. ”
Pour terminer, une précision[10] : “Des
auteurs, comme ARDOINO[11]
parlent de Pédagogies Institutionnelles au pluriel, en raison des diverses
orientations fondamentales de celles-ci. Ainsi le psychiatre Jean OURY est
d’orientation psychanalytique, tandis que chez d’autres[12],
les options sociopolitiques dominent.”
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[1] : ECOLE ELEMENTAIRE, PROGRAMMES ET INSTRUCTIONS, (p. 14), Ministère
de l'Education Nationale., Paris, Ed.
C.N.D.P. (1985)
[2] IMBERT F., “Pour une praxis pédagogique”, (p. 5), Nantes, Matrice, 1985
[3] : OURY F. et VASQUEZ A., Vers une pédagogie institutionnelle, (p.
245 et 248), Paris, Maspéro, 1967
[4] : OURY F. et VASQUEZ A., De la Classe Coopérative à la Pédagogie
Institutionnelle, (p. 689), Paris, Maspéro, 1974
[5] : le TRÉPIED de la P.I.
[6] : PAIN J., Pédagogie institutionnelle et formation, (p. 22), Paris, Micropolis,
1982
[7] : P.I. : Pédagogie
Institutionnelle
[8] : NDLR : Jean OURY, médecin
psychiatre et frère de Fernand OURY. S’est intéressé aux Techniques Freinet à
ce mouvement pédagogique dès 1949. A travaillé avec Félix GUATTARI.
[9] : DELDIME R., DEMOULIN R., Introduction à la psychopédagogie, 3ème
édition, (p.181), Bruxelles, De Boeck Université, 1994
[10] : DE LANDSHEERE V., L’éducation et la formation, (p. 156),
Paris, P.U.F, 1992
[11] : ARDOINO Jacques, Les pédagogies institutionnelles in
MIALARET G. & VIAL J., Histoire
mondiale de l’éducation, (p. 129-150), Paris, P.U.F, 1981
[12] : NDLR : LAPASSADE G., LOBROT
M., LOURAU R....