ESSAI D'EXPLICITATION DE LA DEMANDE :
Ce
texte répond à la demande d'un professeur en Sciences de l'Education de
l'Université Paul Valéry (Montpellier) de faire un exposé dans un cours de
licence sur les "Politiques éducatives".
Bien.
Mais que dire ? Essayons de clarifier :
Une
politique :
-
"Enoncé général ou énoncé de principes indiquant la ligne de conduite adoptée par un organisme privé ou public, dans
un secteur donné, pour la gestion de ses affaires."
- "Ensemble des ambitions, des principes et des objectifs
fournissant la base de la planification détaillée et de l'action effective,
constituant le guide de la prise de décision"[1]
Une politique est donc au service de quelqu'un (chef,
patron, élu...) ou de quelque chose (organisme, parti, gouvernement...)
Une
politique éducative concerne bien entendu...
l'éducation que l'on prendra ici
comme "Ensemble de valeurs, de concepts, de savoirs, et
de pratiques dont l'objet est le développement de l'être humain et de la société"[2].
De
fait, la politique éducative désignera
la détermination de finalités, puis d'objectifs, l'octroi des moyens,
l'évaluation des résultats par rapport aux objectifs.
Nous
pourrons donc considérer une politique
et l'éducation comme des "moyens au service de..." et
le fait de préciser au service de qui ou de quoi nous
entraîne directement dans la dimension téléologique des politiques éducatives.
Je vous renverrai ici au cours de M. PATURET sur les "Philosophies de l'Education" et pourquoi pas à l'excellent
"Que sais-je ?" d'Olivier REBOUL ayant le même titre.
Une
politique éducative est-elle au service d'un dirigeant (dictateur ?), d'un
parti politique, d'une société, d'une économie, de l'Homme, de l'Humanité... ?
Et suivant la réponse apportée nous pouvons mieux essayer de comprendre comment
fonctionne une institution comme l'Education "Nationale" dans tel ou
tel pays où elle existe. A l'inverse, par une analyse herméneutique, il sera
possible de comprendre quels sont les finalités et les enjeux d'une politique
éducative.
Avant d'aborder les politiques éducatives actuelles, faisons un rapide retour dans le passé pour appréhender quelques dires et faits significatifs de quelques finalités éducatives.
Luther (1524) : "Il
nous faut en tout lieu des écoles pour nos filles et nos garçons afin que
l'homme devienne capable d'exercer convenablement sa profession et la femme de
diriger son ménage et d'élever chrétiennement ses enfants."
LOUIS
XIV (1669) abandonne à l'Église, aux villes et aux communautés rurales toutes
initiatives et toutes dépenses relatives à l'enseignement élémentaire, MAIS
supprime les écoles protestantes. Et la Déclaration
royale de 1698 pose le principe d'une obligation scolaire sous l'égide de
l'État et le contrôle de l'Église catholique. Objectifs de l'enseignement : les
vérités de la foi, le rituel catholique, la messe quotidienne et "apprendre à lire et même à écrire à
ceux qui pourraient en avoir besoin".
Jean-Baptiste
de LA SALLE (1678) se consacre à la scolarisation gratuite des pauvres.
LA
CHALOTAIS (siècle des Lumières) dans son Essai
d'Éducation Nationale écrit : "Le
bien de la société demande que les connaissances du peuple ne s'étendent pas
plus loin que ses occupations".
En
1747 l'État créée des écoles d'ingénieurs pour former les élites de son
administration civile ou militaire.
LAMOIGNON
(1783), premier président du parlement de Paris, déclare : "L'éducation doit être sous l'inspection de la puissance publique
parce qu'elle doit être toute dirigée pour l'utilité générale et pour le bien
de l'État". Les Jésuites sont mis à l'écart.
CONDORCET
écrit en 1792 : "Former d'abord la
raison, instruire à n'écouter qu'elle, (...) tel est le principe sur lequel
l'instruction publique doit être combinée".
NAPOLÉON
1er fonde en 1806 "sous le nom
d'Université impériale, un corps exclusivement chargé de l'enseignement et de
l'éducation publics dans tout l'Empire". Il écrit : "Tant qu'on n'apprendra pas dès
l'enfance s'il faut être républicain ou monarchique, catholique ou irréligieux,
l'État ne formera point une nation (...) il sera constamment exposé aux
désordres et aux changements".
L'Etat,
sous la première Restauration (1814), veille à ce que "l'instruction primaire soit fondée sur la
religion, le respect pour les lois, et l'amour dû au souverain".
GUIZOT
(1833) : "L'instruction primaire
universelle est désormais une des garanties de l'ordre et de la stabilité
sociale".
etc.
avec ensuite la période Jules FERRY et ses successeurs.
De
ce propos introductif il apparaît clairement que "politique éducative" et "pouvoir" sont intiment liés. Essayons aujourd'hui
d'appréhender les enjeux, la mise en place de politiques éducatives en France
et les phénomènes qui s'y rattachent.
BREF RAPPEL HISTORIQUE :
A titre de mémoire voyons également rapidement quelques grands moments qui ont marqué l'histoire de l'Education en France depuis la Renaissance :
François 1er |
1530 |
le Collège Royal |
Jean-Baptiste de la Salle |
1678 |
l'Institut des frères des
écoles chrétiennes |
Révolution |
1789 |
Rapport TALLEYRAND sur l'instruction
publique |
|
1792 |
Rapport CONDORCET |
Restauration |
1815 |
Société pour l'instruction
élémentaire |
Louis Philippe |
1833 |
Loi GUIZOT : Obligation
pour les collectivités de créer des établissements |
|
1835 |
Création du corps des Inspecteurs
primaires |
II° République (1848) II° Empire (1852) |
1850 |
Loi FALLOUX : Liberté de
l'enseignement ; accroissement des prérogatives scolaires de l'église |
|
1865 |
Loi DURUY : Création de
l'enseignement (secondaire) spécial court |
|
1866 |
Fondation de la Ligue
Française de l'enseignement |
|
1867 |
Loi DURUY : enseignement
primaire et pour les jeunes filles |
III° République (1870) Commune de Paris (1871) |
1875 |
Institution de la liberté
de l'enseignement supérieur |
|
1879 1880 |
Loi CAMILLE SÉE : création
des lycées de jeunes filles Loi PAUL BERT : création
des E.N.I. |
|
1881 1882 |
Loi JULES FERRY : gratuité
écoles primaires publiques, E.N., et salles d'asile Obligation scolaire (6-13
ans) ; laïcisation des programmes |
|
1886 |
Loi GOBLET : (loi
organique) Organisation générale de l'école primaire ; laïcisation du
personnel des écoles publiques |
|
1889 |
Les maîtres des écoles
publiques deviennent fonctionnaires de l'Etat |
|
1905 |
Loi COMBES : Interdiction de
l'enseignement aux congrégations ; Séparation de l'église de l'Etat |
|
1909 |
Création de classes de
perfectionnement pour "enfants arriérés" |
|
1926 |
Uniformisation des
programmes des écoles primaires et ceux des classes élémentaires des lycées et
collèges |
|
1930 |
Gratuité de l'enseignement
secondaire |
|
1936 |
Loi JEAN ZAY : Obligation
scolaire jusqu'à 14 ans |
|
1937 |
Uniformisation des
programmes des écoles primaires supérieures et du premier cycle des lycées et
collèges |
|
1939 |
Création des centres de
formation professionnelle |
Gouvernement de VICHY |
1940 1944 |
Suppression des E.N. ;
autorisation d'enseigner aux congréganistes ; suppression de la gratuité au
second cycle ; subventions aux écoles libres |
IV° République |
1944 |
Plan LANGEVIN-WALLON : - Projet d'un nouveau
système éducatif comportant deux degrés de trois cycles chacun - Projet de formation des
maîtres du premier degré, appartenant à un corps unique (2 ans E.N. + 2 ans
université) - Projet de
perfectionnement continu |
|
1959 |
Réforme BERTHOIN : - Obligation scolaire
jusqu'à 16 ans - Réforme de
l'enseignement public (cycle élémentaire 6-11 ans ; cycle d'observation 11-13
ans ; premier cycle 13-15 ans ; second cycle 15-18 ans) - Création des C.E.T, des C.E.G. |
|
1959 |
Loi DEBRÉ : Possibilité
pour les écoles privées de passer un contrat avec l'Etat |
|
1963 |
Instauration de la carte
scolaire Réforme FOUCHET : création
des C.E.S. et des filières dans le secondaire |
|
1968 |
Grèves et émeutes Loi EDGAR FAURE :
réorganisation de l'université |
|
1969 |
Réforme de réorganisation
pédagogique des écoles primaires ; "discipline d'éveil" |
|
1970 |
Mathématiques modernes |
|
1975 |
Réforme HABY : Création du
"Collège unique" ; suppression des filières ; instauration du
soutien ; les C.E.T. deviennent L.E.P. ; création des conseils d'école |
|
1977 |
Loi GUERMEUR : Financement
par l'Etat de la formation des instituteurs du privé sous contrat |
|
1982 |
Mise en place des Z.E.P.
(SAVARY) |
|
1984 |
Projet de loi SAVARY :
"grand service public" ; abandon du projet et démission |
|
1985 |
- Loi de décentralisation
(CHEVÈNEMENT) - Création du Bac
professionnel |
|
1989 |
- Loi d'orientation
(JOSPIN) - Création du conseil national
du programme - Création des I.U.F.M. - Autonomie pédagogique
des écoles, collèges et lycées (projet d'établissement) |
|
1995 |
Nouveau Contrat pour
l'Ecole (BAYROU) |
La France s'est dotée depuis la fin du XIX° siècle d'une institution au service de l'Education, à savoir une "administration centrale" qui, au fil du temps a changé d'appellation, ce qui est peut-être intéressant à analyser :
(164 ministres depuis 1928)
Révolution |
1789 |
Divers projets d'un
service de l'instruction publique |
NAPOLEON 1er |
1802 |
Direction de l'instruction
publique sous autorité du Ministère de l'Intérieur. |
|
1806 |
L'Université impériale |
|
1808 |
Administration de
l'enseignement |
Chute de l'Empire |
1815 |
Conseil royal de
l'Instruction publique |
|
1824 |
Ministère des affaires
ecclésiastiques et de l'instruction publique |
|
1828 |
Premier Ministère de l'instruction
publique |
|
1932 |
Ministère de l'Education
Nationale |
|
1974 |
Ministère de l'Education
et secrétariat d'Etat aux universités (HABY) |
|
1981 |
Ministère de l'Education
Nationale (SAVARY) |
|
1988 |
Ministre de l'Education Nationale
de la Jeunesse et des Sports (JOSPIN) |
|
1992 |
Ministre de l'Education
Nationale et de la Culture (LANG) |
|
1995 |
Ministère de l'Education
Nationale (BAYROU) Ministère de l'Education Nationale,
de l'Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l'Insertion
Professionnelle |
Cette
institution est, schématiquement, de type pyramidal avec au sommet un MINISTRE et à la base des Enseignants et
des Agents chargés de mettre en oeuvre, d'appliquer les directives
ministérielles. Dans le milieu enseignant le Ministère est encore appelé
aujourd'hui "la centrale" !
Significatif.
Si
l'on observe l'organigramme actuel (distribué)
de notre Ministère E.N., nous pouvons y voir, sous la direction du Ministre,
entouré de son "cabinet" dont les membres sont qualifiés de
"politiques" (en opposition aux autres que l'on nommera
"administratifs"), quatre sous-systèmes composés chacun de "bureaux",
de "comités", de "directions", et à côté un service nommé
"contrôle financier".
Dans
la pyramide, sous la "centrale" nous trouverons d'autres systèmes
tels les RECTORATS (28) avec à leur
tête un Recteur nommé par le Président de la République par décret pris en
conseil des Ministres. Le Recteur, en tant que représentant du Ministre, doit
transmettre ses ordres et veiller à l'exécution de ses décisions ainsi qu'à la
mise en oeuvre de toutes les dispositions législatives et réglementaire
relatives à l'enseignement. Il doit diriger, organiser, contrôler.
Sous
les Rectorats nous trouvons les ACADEMIES
(100), avec à leur tête un Inspecteur d'Académie, directeur des services
départementaux de l'Education Nationale, représentant le Recteur et nommé par
décret du Président de la République sur proposition du Ministre. L'I.A. est
"chargé d'animer et de mettre en oeuvre dans le département la politique éducative du Ministre".
Il reçoit du Recteur toutes directives et instructions pour administrer
l'enseignement dans le département. Il lui adresse en retour toute information
utile et lui rend compte de son activité et de celle des établissements et
écoles qu'il contrôle. L'I.A. peut être assisté d'I.A. adjoint(s) et d'I.E.N.
adjoint(s).
Sous
les Académies nous trouvons les SERVICES
DEPARTEMENTAUX avec :
-
les I.E.N. avec une fonction de
contrôle et d'animation pédagogique.
-
des Inspecteurs spécialisés (A.I.S.
; Information et Orientation ; Enseignement Technique ; Jeunesse et Sports ;
Apprentissage).
-
un chef des services administratifs.
Dans
chaque département nous trouvons :
-
des Circonscriptions au niveau du
primaire (maternelle et élémentaire) avec à leur tête un Inspecteur de l'E.N. ;
-
des Etablissements du second degré, avec
à leur tête des chefs d'établissements.
Sans
entrer dans le détail nous comprenons qu'il s'agit d'une "machine" au service d'une
politique éducative dictée par un Ministre. Donc des décideurs et des
exécutants. Dans le système "taylorien" de notre société jusque dans
les années 1970, les exécutants étaient avant tout des Agents (au sens où le
précise J. ARDOINO) sans aucun pouvoir, obéissant à des
"Instructions". Depuis 1970 nous sommes passés dans un système social
que l'on pourrait qualifier de "régulationniste" où les exécutants
sont considérés comme des Acteurs devant mettre en oeuvre des directives, des
orientations d'une politique. Ceci s'est encore plus développé avec la loi de
décentralisation de 1982 qui a établi une nouvelle répartition des compétences
entre les communes, les départements, les régions et l'Etat.
Il faut aussi préciser que cette "machine" est dotée de
"contrôleurs", des inspecteurs, chargés de vérifier la transmission,
l'application des instructions, ou, maintenant, de vérifier l'adéquation entre
les directives et les pratiques sur le terrain, dans les classes.
UNE TERMINOLOGIE PARTICULIERE
La mise en oeuvre d'une politique éducative se
traduit par des "textes officiels"
publiés dans un B.O.E.N. (que les établissements doivent acheter ! 460 F.)
qui utilisent une terminologie dont l'observation est aussi intéressante. Ainsi
nous trouvons des :
- Lois (cadres, d'orientation, organiques...)
Loi : Règle de droit suprême dans la hiérarchie des normes ;
ensembles des règles émises par une autorité qualifiée.
Règle écrite, générale et
permanente, élaborée par le parlement ; acte voté par le parlement selon la
procédure législative et dans l’une des matières que la Constitution lui
réserve expressément.
Loi cadre : qui se borne à poser des principes généraux et laisse au Gouvernement le soin de les développer en utilisant son pouvoir réglementaire.
Loi organique : Qui se rapporte à un organe. Loi votée par le Parlement pour préciser ou compléter les dispositions de la Constitution.
Loi d’orientation : loi qui, pour l’ensemble, fixe une politique globale à réaliser en un temps plus ou moins long et prend les dispositions législatives nécessaires à cet effet dès ce moment.
- Décrets : décisions du pouvoir gouvernemental dont les
effets sont semblables à ceux des lois.
Terme générique désignant une catégorie d’actes administratifs unilatéraux pris par les deux plus hautes autorités exécutives de l’Etat : le Président de la République et le 1er Ministre. Décision exécutoire à portée générale.
- Arrêtés : décision écrite de l'autorité administrative
Actes généraux, collectifs ou individuels, pris par différentes
autorités administratives comportant en général un dispositif rédigé en
articles.
- Programmes : ensemble d'instructions nécessaires pour
atteindre les objectifs d'une politique éducative ; programme d'activités
(concernant les enseignants et les élèves) conçu de manière à ce que les élèves
atteignent dans toute la mesure du possible certains objectifs éducatifs.
- Règlement :
Acte de portée
générale et impersonnelle édicté par les autorités exécutives compétentes.
Un règlement d’application est destiné à assurer l’application d’une loi sans
pouvoir l’enfreindre.
- Circulaires :
Instructions de service écrites adressées par une autorité supérieure à
des agents subordonnés en vertu de son pouvoir hiérarchique. Dépourvues de
force obligatoire, elles jouent un rôle majeur dans les relations de
l’Administration avec les administrés.
Destinée à guider l’action des fonctionnaires et agents dans l’application des
lois et règlements. Mesure d’ordre intérieur.
- Instructions officielles : ensemble des textes régissant la
mise en oeuvre d'une politique éducative
Prescription pratique donnée à un subordonné pour l’exécution d’un ordre ou l’application d’une règle : norme d’application ; directive.
-†Notes de service : informations, instructions communiquées
au sein d'un service.
Terme neutre désignant un document explicatif généralement bref
LES DETERMINANTS D'UNE POLITIQUE EDUCATIVE
Un
Ministre n'élabore jamais seul une politique éducative. Cette dernière
s'inscrit dans un programme politique présenté par le Président de la
République qui choisit son Gouvernement avec un 1er Ministre qui choisit (en
principe) le Ministre de l'E.N. Donc, les grands axes de la politique éducative
sont tracés au niveau du chef de l'Etat.
Le
Ministre élabore un projet éducatif avec l'aide d'organes consultatifs,
d'experts politiques et parfois pédagogiques. Si nécessaire il commande des
"rapports" à des "chargés de mission".
Dans
une démarche de type "centralisation"
ce travail est mené en commissions relativement fermées. Dans une démarche de
type "décentralisation"
cela se fait par consultations (experts, chercheurs, praticiens,
partenaires...)
Cette
politique éducative sera influencée par divers déterminants que l'on pourrait repérer par une analyse systémique.
Repérons-en quelques-uns :
- déterminants sociaux
(chômage, immigration, progrès, grèves, structure familiales...)
- déterminants économiques
(crises, développements, finances...)
- déterminants technologiques
(de l'imprimerie à internet...)
- déterminants philosophiques
(humanisme, exploitation, respect de l'autre...)
- déterminants démographiques
(augmentation / baisse des effectifs, immigration...)
- déterminants scientifiques
(étude sur les rythmes, travaux sur la mémoire...)
- déterminants idéologiques
(libéralisme, positivisme, communisme, socialisme...)
- déterminants moraux (la
morale laïque...)
- déterminants juridiques
(la C.I.D.E...)
- ...
LA MISE EN OEUVRE D'UNE POLITIQUE EDUCATIVE
Cette
mise en oeuvre se traduit par une machine, des textes, des individus, des
moyens (matériels, financiers)...
Cela
se traduira aussi par des actions de formation pour les personnels, des
projets, des écrits (I.O. et textes pédagogiques), des pratiques
pédagogiques...
Jusque
dans les années 1970 cette mise en oeuvre était surtout de type impositif dans un système axé sur la centralisation plus ou moins
"pure"
Aujourd'hui
elle est davantage de type participatif
plus ou moins dirigé. Ainsi nous trouverons des demandes d'élaboration, de
création de projets formulées aux gens du terrain, dans les établissements, les
circonscriptions, les zones (sensibles, prioritaires), etc. On pourra trouver
des enquêtes de terrain avant l'élaboration de nouvelles directives,
orientations ministérielles ou inspectorales. On pourra même trouver des
analyses de besoin en amont d'actions de formation.
Nous pourrions parler de concertation, de va et vient entre le haut et le bas
de la pyramide... Cela correspond davantage à un système axé sur la décentralisation plus ou moins
"pure"
Globalement,
aujourd'hui, il y a un projet général
qui se traduit par une loi
d'orientations de 1989, explicitée dans des programmes qui, par les maillons
successifs seront transmis, explicités puis mis en actes, avec une liberté de
pratiques pédagogiques, par les enseignants auprès (au service) des élèves.
Concrètement
sur le terrain, un exemple : notre département au niveau du primaire.
Le
cadre général : • La loi
d'orientation de 1989
• Le
Nouveau Contrat pour l'Ecole (1995)
• Les Nouveaux
Programmes de 1995
Ø L'I.A. élabore un Programme
d'Actions Départementales (présenté en CTPD et au CDEN) et mis au point après
consultation de partenaires.
Ce
P.A.D. est une première mise en application du N.C.E. au niveau départemental.
Il est pluriannuel et est complété par trois documents sectoriels consacrés à
la Zone rurale, aux Zones difficiles, et aux Enfants handicapés pour essayer de
répondre aux situations particulières de notre département.
Ce
P.A.D. fixe des objectifs à atteindre (qualitatifs et quantitatifs) et
préconise des méthodes pour travailler.
Ses
grandes lignes sont :
-
"Volonté d'améliorer la qualité du
service public en utilisant au mieux les moyens mis à disposition par la
collectivité nationale
- Développement de l'esprit de l'entreprise
"Education Nationale" et à travers lui, volonté permanente
d'améliorer la réussite scolaire et souci constant de le faire savoir
- Renforcer le dialogue social et les
solidarités internes pour mieux associer tous les personnels aux décisions et
les aider à faire face aux défis de notre temps."
Ø L'I.A. réunit régulièrement
les I.E.N., parfois avec les C.P.A.I.E.N. pour étudier, réfléchir sur la mise
en oeuvre du P.A.D., des Nouveaux programmes. Il peut rédiger des circulaires,
des notes de service pour aider à cette mise en oeuvre.
Ø Les I.E.N., aidés de leur
équipe de circonscription vont informer, aider, former les enseignants à la
traduction en actes des Nouveaux programmes.
Ø Un Plan Départemental de
Formation est élaboré pour permettre une formation continue en prise directe
avec les N.C.E. et les N.P.
Ø Des enquêtes (sur études
dirigées), des évaluations, des inspections sont réalisées pour vérifier l'adéquation
entre les instructions et les pratiques.
DES LIMITES...
Mais
une observation fine permet de voir que la mise en oeuvre d'une politique
éducative dépend avant tout des
personnes qui se trouvent à la tête, dans les échelons intermédiaires ou à la
base de la grande pyramide. L'éducation est un métier de l'humain !
Les
politiques éducatives se mettent en place avec plus ou moins de succès. Elles
peuvent rencontrer des résistances (au changement), des freins (manque de formation, de
moyens, de compétences, de temps), des
blocages (désaccords profonds
pouvant déboucher sur des manifestations, des grèves...)
Enfin
elles évoluent en fonction des changements
politiques...
▲
▲ ▲
MINISTRE(S)
RECTEUR RECTEUR RECTEUR
I.A. I.A. I.A. I.A. I.A. I.A. I.A. I.A.
I.E.N. I.E.N. I.E.N. I.E.N. I.E.N. I.E.N. I.E.N. I.E.N. I.E.N. I.E.N.
Enseignants
Enseignants Enseignants Enseignants Enseignants Enseignants Enseignants
élèves élèves élèves élèves élèves
élèves élèves
élèves
élèves élèves
élèves élèves
AUDUC (J.-L.), Profession enseignant, Le système éducatif, Paris, Hachette Éducation, 1994
BOURSIN (J.-L.), L'administration de l'éducation nationale, Paris, P.U.F, 1981
D.A.G.I.C., Le système éducatif de la France, Paris, Ministère de l'E.N., Octobre 1995.
DURAND-PRIMBORGNE (C.), L'éducation nationale, une culture, un service, un système, Paris, Nathan Université, 1992
GAULUPEAU (Y.), La France à l'école, Paris, Découverte Gallimard, 1992
LEGRAND (L.), Les politiques de l'éducation, Paris, P.U.F, 1988
MINOT (J.), Deux siècles d'histoire de l'Éducation nationale, Paris, Ministère de l'E.N., 1988
PÉRIÉ (R.), Organisation et gestion de l'éducation nationale, Nancy, Berger-Levrault, 1991.
@&?
▼
Quelques pistes
extraites de la lecture du Que sais-je de Louis LEGRAND,
"Les politiques de l’éducation", Paris,
1988
L'éducation comme domaine politique.
L'éducation, réalité institutionnelle est un domaine politique parce qu'il est question d'une organisation collective réglée par des statuts et des lois et matérialisée par des institutions et des règles, des décrets, des règlements, des programmes et des instructions qui les régissent. Parce qu'il y a projet consciemment et explicitement défini avec anticipation et projection dans le temps. Parce qu'il y a liaison avec un pouvoir (exercice, contestation, conquête)
A noter qu'un établissement scolaire peut aussi avoir une politique. généralement on parlera de politique éducative au niveau d'ensembles institutionnels importants : commune, région, Etat (dans les pays à forte centralisation).
Elle prend la forme la forme de ministère, de bureaux, de gestion et d'impulsion, de corps d'inspection.
L'essentiel d'une politique éducative réside dans un projet, sa détermination et sa mise en oeuvre. L'éducation, est projet : agir sur l'enfance pour former l'adulte de demain implique nécessairement la détermination de fins lointaines (il faut au minimum plus de dix ans pour mener un enfant de six ans au terme de ses études) et la détermination d'objectifs opérationnels à moyen terme. Une telle dimension temporelle donne plus d'importance à l'anticipation et la planification que dans tout autre domaine politique.
Mais elle en souligne du même coup les difficultés et les aléas : le pouvoir politique est fondamentalement temporaire surtout dans nos démocraties fondées sur le jeu de l'alternance.
Le poids de la durée dans le domaine de l'éducation est fondamental. C'est probablement la raison pour laquelle la plupart des projets de réformes éducatives ne parviennent pas à leur terme et subissent, en cours de route, les transformations profondes qui les dénaturent ou même les font disparaître.
La politique éducative est impulsée et contrôlée par la hiérarchie. Son application exige, des citoyens en général et des maîtres et administrateurs en particulier, l'obéissance aux lois et règlements.
Comme l'analyse Michel CROZIER, le "système" ne fonctionne et ne se maintien que par l'assentiment des acteurs qui trouvent leur intérêt à abandonner une part de leur liberté pour un profit plus grand ou qui le font par habitude jusqu'au moment où la situation venant à changer, ils découvrent la règle comme oppressante et contraire à leur intérêt.
En matière d'éducation, le pouvoir est soumis aux groupes de pression publics ou occultes (syndicats, associations) et aux mouvements d'une opinion publique qui, en matière d'éducation, se juge en tout point compétente.
La détermination des objectifs.
Cette détermination ne peut se faire qu'à partir de choix plus fondamentaux qui sont les finalités affichées dans les choix politiques. Il s'agit de conception morale et philosophique. C'est pourquoi toute politique éducative s'enracine dans l'idéologie quelle qu'elle soit, explicite ou non, et le fonctionnement des institutions utilisées pour la détermination des fins ne prend sa signification véritable qu'à la lumière de ces idéologies.
La détermination des moyens : structures, contenus, méthodes. Rôle de la recherche en éducation.
La détermination des fins et des objectifs qui les concrétisent est un acte spécifiquement politique. Celle des voies et moyens de les atteindre relève d'un niveau plus technique. (Mais les techniciens proposent et les politiques disposent et les choix des moyens d'une politique éducative sont toujours, finalement, des choix politiques, largement inspirés par l'idéologie.)
Les choix de valeurs sont plus forts que les données scientifiques, quand elles existent.
L'arrivée d'un parti au pouvoir et les décisions parlementaires qui suivent ne peuvent que décider de grandes orientations publiées la plupart du temps sous forme de "lois-cadres". Un travail de traduction opérationnelle doit succéder au niveau des administrations centrales dans les pays centralisés, au niveau des régions, des communes ou même des établissements dans le cas des états décentralisés.
A ce niveau d'élaboration on peut distinguer théoriquement trois moments fondamentaux :
1) L'élaboration théorique
A toujours lieu au sein de commissions réunies à l'initiative des pouvoirs. Elles fonctionnent selon les conceptions idéologiques des commanditaires (confidentielles ou non, intégrant ou non la recherche, dépendantes ou non du pouvoir)
2) L'expérimentation
Suivant les pays, la mise en place d'innovations ne s'accompagne d'aucune expérimentation ni d'aucun recours à la documentation scientifique disponible.
3) La généralisation
Suivant les politiques éducatives, la généralisation sera plus ou moins rapide tenant compte ou non de l'évaluation de l'expérimentation. Or, il n'y a pas de recherche valable sans durée. La mise en place d'une innovation demande une formation sérieuse du corps enseignant tout comme la généralisation ce qui nécessite du temps et des moyens financiers importants qui sont rarement disponibles.
Parfois, les manuels sont conçus à la hâte sans être testés de façon rationnelle.
La forte centralisation et surtout la hiérarchisation du système éducatif français rend très difficile l'acceptation par cette hiérarchie de la délégation de pouvoir que suppose nécessairement l'intervention d'un centre de recherche scientifique. Et lorsque le pouvoir politique, sous la pression de l'événement, ou parce qu'il se trouve conseillé par tel ou tel technocrate, décide la prise en compte des résultats de la recherche, il confie la rédaction des programmes et des instructions qui en découlent aux corps d'inspection.
Dans les années 1970, on a cherché à développer un autre mode de recherche donnant une responsabilité active aux enseignants jusque là chargés seulement d'appliquer ce que d'autres avaient trouvé pour eux : c'est le domaine de la recherche-action constituant par là même un modèle pour la formation permanente. Mais le contrôle d'une telle recherche échappe à la hiérarchie qui perçoit cette créativité comme dangereuse, comme une prise de pouvoir illégitime. La recherche-action produit une diversité d'interprétations considérées comme susceptibles de porter atteinte à l'unité nationale de l'enseignement, risque d'autant plus grand que les centres de recherche sont des centres de formation... Le souci de préserver la norme va de pair avec celui de conserver le pouvoir.
La centralisation, les normes nationales, l'importance de la hiérarchie, l'individualisme des maîtres, la justice abstraite d'examens anonymes, tout cela fait partie de la personnalité de base du Français façonnée par des centaines d'années de régalisme. A l'opposé, l'autonomie locale, l'équipe pédagogique dotée de pouvoirs sur les programmes et les horaires, une hiérarchie recours et conseil, un ministère définissant des orientations générales non imposées, tout cela appartient à un autre monde : le monde anglo-saxon.
La mise en oeuvre des politiques et la planification.
Les finalités et les objectifs définis, vient la phase de mise en oeuvre qui doit être précédée d'une nouvelle phase théorique au cours de laquelle l'administration est chargée d'étudier les conditions précises de la réalisation : c'est le rôle de la planification qui sera à deux niveaux : la planification provisionnelle et la planification d'accompagnement et de régulation.
Une vraie réforme coûte ; sa réalisation passe nécessairement par le vote de crédit. La planification provisionnelle aboutit donc à des chiffrages et des propositions budgétaires compte tenu des moyens disponibles et aussi de l'intérêt que le pouvoir politique porte à la réforme qu'il entreprend.
La planification peut aller à l'encontre de la conception d'une politique éducative ce qui fut le cas après la vaste consultation démocratique lancée par Alain SAVARY.
L'unification d'un système éducatif, décidée au sommet, ne peut se réaliser à la base que si les pouvoirs sont donnés à chaque établissement d'adapter ses structures et sa pédagogie à la diversité des publics et à son évolution dans le temps. Une planification normative, hiérarchique et a priori est incapable de prendre en compte cette diversité évolutive. Elle ne peut, pour être efficace, que dessiner un cadre général avec moyens de même nature et définir des règles d'utilisation souples donnant aux autorités locales de larges initiatives avec contrôle a posteriori. La planification normative a priori reste la règle en France... de là des distorsions du système. Ajoutons que la formation des maîtres chargés d'appliquer ces réformes est toujours restée très insuffisante dans son volume comme dans sa conception.
L'impossibilité de former des masses importantes en un laps de temps court conduit, dans le meilleur des cas à planifier cette formation en l'étalant sur plusieurs années.
L'information seule ne peut diffuser une réforme.
La mise en place d'une politique éducative dépendra du choix d'une politique normative, définie au sommet et impulsée hiérarchiquement ou d'une politique démocratiquement décidée et proposée à l'engagement d'acteurs responsables. Dans le premier cas, l'essentiel apparaît la publication d'instructions et de règlements, et la vérification hiérarchique de l'obéissance à ces textes. Dans le second cas, l'essentiel réside dans la naissance et la prise de conscience d'un besoin de formation et dans l'offre de formation faite à des engagements volontaires. (à noter par exemple la suppression par René MONORY de la mission à la recherche et à la formation créée par Alain SAVARY, et la création corrélative d'une direction des personnels de direction et d'inspection).
Donc deux conceptions opposées : d'une part, l'importance attachée à la normalité nationale et à la croyance à l'efficacité des contraintes hiérarchique. D'autre part, l'incitation à l'initiative et la recherche de la diversité dans l'engagement volontaire.
Centralisation ou autonomie locale.
Quand on compare l'organisation politique des systèmes éducatifs en Europe, on constate la diversité des situations des gouvernements par rapport aux établissements.
D'une part, les pays d'influence culturelle anglo-saxonne ou les gouvernements se bornent à définir les cadres généraux de l'action sans intervenir directement dans l'organisation et la gestion des établissements.
D'autre part, les pays, en général continentaux, où les gouvernements régissent, parfois jusque dans le détail, cette organisation et cette gestion.
La France présente une structure extrêmement centralisée, et malgré les orientations définies par la loi de décentralisation de 1982, la marge de manoeuvre des autorités locales est très réduite et demeure très fragile. Les tendances à la récupération hiérarchique se manifestant de façon constante.
Selon EISENMANN[3], il y a décentralisation imparfaite ou relative, lorsque dans une activité interviennent tant des organes centraux que des organes non centraux, mais que la suprématie y appartient en définitive aux organes non centraux.
En France, la "décentralisation" ne transfère presque jamais le pouvoir réel aux instances régionales et locales. Elle ne fait que "déléguer" des compétences décisoires dans des domaines soigneusement balisés aux représentants du pouvoir central auxquels des comptes sont toujours à rendre.
Ainsi dans le domaine pédagogique, les projets d'établissement restent marginaux, les conseils d'administration n'ayant pas le pouvoir de décider ni des horaires ni des programmes.
A noter qu'en matière de politique éducative, il peut très bien y avoir centralisation au niveau d'unités géographiques très petites (communes, circonscriptions, établissements).
Un des aspects les plus importants pour le fonctionnement de l'école se trouve dans la nature, la fonction de la hiérarchie et en particulier dans celui des corps d'inspection. En France, les inspecteurs sont les représentants du pouvoir central. Ils sont chargés d'impulser, ce contrôler, et de rendre compte au ministre en fonction des normes nationales. Ils notent les fonctionnaires par référence à ces normes. Ils sont recrutés par choix ou par concours par rapport à ces mêmes normes. Ces fonctions inspectorales sont au coeur des problèmes actuels de l'école dans la mesure ou un choix demeure sans cesse ouvert entre le monopole du pouvoir central et l'autonomie locale des établissements et des maîtres. D'où une oscillation sans cesse entre le contrôle des normes et l'animation pédagogique.
La nature centralisée ou décentralisée d'un système éducatif se répercute au niveau de l'établissement lui-même.
La dialectique centralisation-décentralisation a donc une importance considérable dans la mesure où elle est liée à des conceptions très différentes de l'éducation et des valeurs qu'elle met en oeuvre. Ainsi la centralisation en matière d'éducation est liée à un corps de doctrines groupé autour de valeurs étroitement liées :
- l'unité nationale se traduisant par l'universalité de la loi et des normes qu'elle véhicule.
- la justice dans la mesure où cet ordre s'appliquant à tous est censé créer les conditions d'une égalité des chances.
- l'importance attachée au savoir comme instrument de libération de l'homme est gage de progrès collectif.
- la valeur de l'individu (qui fonde l'élitisme républicain)
Unification et différenciation dans les systèmes éducatifs.
La pluralité des écoles ou des filières de formation reproduit la division sociale de nos sociétés. Rappelons l'analyse de DURKHEIM : l'éducation doit répondre à deux objectifs sociaux. D'une part, unifier le corps social par la transmission et la diffusion d'une idéologie commune constitutive d'une nation. D'autre part, diversifier pour répondre aux différents emplois résultant de la division sociale du travail, et, de celle des classes sociales, exécutants et dirigeants.
L'unification du corps social comme objectif de l'unification d'un système éducatif se heurte à des problèmes de nature biologique (pas toujours du goût de tous). Le christianisme, le positivisme, le marxisme, la laïcisation... peuvent être des principes admis d'une unification mentale.
Mais la réalisation effective de l'unification se heurte à un problème fondamental : celui de la prise en compte de l'hétérogénéité des publics scolaires. C'est pourquoi la condition institutionnelle fondamentale de toute unification scolaire est la décentralisation et le pouvoir local de définir démocratiquement des projets d'établissement, comprenant la détermination des programmes et des méthodes au vue des populations scolaires qu'il convient de traiter. Bien entendu, la référence à des objectifs terminaux nationaux demeure possible et souhaitable.
Le choix des contenus et des méthodes.
En matière de politique éducative les décisions prises sur les structures ont des effets immédiats qui relèvent essentiellement de l'administration. Il n'en va pas de même de la pédagogie. Les programmes et les instructions officielles sont pourtant légalement des actes juridiques, élaborés et diffusés par le pouvoir. Les corps d'inspection sont les instruments institutionnels de leur implantation et de leur contrôle. Les centres de formation en sont les relais. Les manuels diffusent des programmes au niveau des consommateurs. Mais il est plus facile de changer une structure que de changer une pédagogie. Ce qui se passe dans la salle de classe relève de la liberté d'interprétation des enseignants, de leur capacité à comprendre ce qui est demandé, de celle aussi de modeler leur comportement sur les recommandations faites (ce domaine est celui de la tradition, de la persistance des habitudes, de la neutralisation inconsciente des nouveautés voulues par le législateur).
Aucun choix pédagogique n'est neutre :
- quelle place l'enseignement doit-il faire respectivement à l'éducation et à l'instruction ?
- faut-il ou non unifier les curricula et jusqu'à quel niveau d'enseignement ?
- quelles disciplines retenir pour faire face aux besoins de formation et quelle sorte d'activité mettre en oeuvre dans l'enseignement de ces disciplines ?
La lutte contre l'échec scolaire.
Cette notion n'est pas neuve. Dès 1909 le problème de l'échec avait été posé politiquement avec la création à Paris des premières classes de perfectionnement mettant en oeuvre une pédagogie inspirée des grands novateurs. BINET et SIMON en furent les théoriciens et inspirateurs, précédés au siècle précédent par ITARD et SEGUIN au temps du développement de l'industrialisation et de la scolarité primaire. La scolarité obligatoire (1882) rendit nécessaire la prise en compte juridique du problème de l'échec.
La lutte contre l'échec scolaire pourra se traduire par des curricula séparés ou différenciés, par des établissements et structures spécialisés, par la définition de zones sensibles ou prioritaires avec des moyens particuliers...
Au vue des évolutions contemporaines, il est difficile de catégoriser de façon dichotomique classique les politiques éducatives en politique de droite et politique de gauche (les clivages se situent à l'intérieur même des partis).
La clé de l'opposition entre des politiques éducatives n'est pas dans l'appartenance politique affichée. Il semble qu'il faille la chercher dans les attitudes fondamentales liées aux valeurs et à la façon de percevoir l'enfance et l'adolescence.
- d'un côté, les centralisateurs, élitistes, nationalistes, sensibles au savoir constitué, aux normes, à la hiérarchie, à la justice formelle liée au mérite et à la compétence.
- d'un autre côté, ceux qui mettent l'accent sur le sujet apprenant, sur son développement personnel, la convivialité, l'autonomie personnelle et institutionnelle.
Ces attitudes de base se développent ou non en idéologie. Mais les justifications intellectuelles de ces partis pris ne sont pas essentielles et la lutte pour le pouvoir nécessairement inhérente à toute politique, conduit souvent à obscurcir les convergences et les divergences fondamentales.
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