Compte
rendu synthétique de l’atelier amphithéâtre
Intervenants :
Brigitte RIERA – Solange PETIOT
Animateur :
Patrick ROBO
Janvier
2002
Les
dispositifs d’analyse de pratiques professionnelles (APP)
Faisabilité/mise
en œuvre de groupes d’APP
Choix de
l’institution/administration
Cet atelier regroupait plus d'une centaine de
participants qui ont pu dialoguer après deux témoignages d'analyses de
pratiques exposées par Solange Petiot,
psychanalyste, puis par Brigitte RIERA,
formatrice.
Le premier récit évoquait la
situation d'une enseignante de classe maternelle en difficulté relationnelle
avec une petite fille, situation traitée dans le cadre d'un groupe de soutien
au soutien développé par l'Association des Groupes de Soutien au Soutien
(A.G.S.A.S.[2]) créée par
Jacques LEVINE. Cette méthode se décline en quatre étapes :
-
1
– présentation par un exposant d'une situation vécue personnellement
-
2
– ressenti du groupe dans la "non conflictualité"
-
3
– recherche du modifiable
-
4
– reprise de la parole par l'exposant avec recherche de compréhension de ce
vécu.
Le deuxième récit relatait
une situation analysée en groupe également dans le cadre de la formation de
néo-titulaires de postes "PEP 4", situation d'une jeune
"prof" d'histoire-géographie
se sentant dépassée et menacée par la violence d'un élève.
Chaque exposé a été suivi de
nombreux échanges avec les présents à cet atelier, échanges qui auraient pu se
poursuivre si le temps imparti avait été plus long et dont il ressort un
certain nombre de questions, d'interrogations et de réflexions synthétisées,
par commodité de présentation, en dix points.
Les deux termes sont employés et une distinction
semble s'opérer. Les groupes correspondent davantage à une inscription dans la
durée nécessaire à un travail évolutif d'analyse, alors que les ateliers
peuvent laisser penser que l'on peut faire le l'APP ponctuellement de manière
"opportuniste", voire "spontanée". La discussion montre
également que l’analyse en relation duelle de manière ponctuelle est parfois
pratiquée par certains formateurs.
Il apparaît nécessaire de repérer, clarifier,
préciser quel est le cadre théorique, conceptuel de référence sur lequel est
fondé tout dispositif d'APP (multiréférentialité ou monoréférentialité :
psycho-sociologique, analyse institutionnelle, psychanalyse, etc…). Chaque
cadre référentiel n'est pas neutre et induit des pratiques différentes dont les
effets ne sont pas identiques.
Les deux témoignages de cet atelier permettent de
repérer des principes invariants : confidentialité, assiduité, régularité,
respect de la parole. Ces principes apparaissent comme incontournables pour qu'une
authentique analyse ait lieu.
D'autres principes interrogent les
participants : l'APP est-elle compatible avec volontariat ou obligation de
participation, avec mixité ou homogénéité du public (débutants et ou anciens) ?
Les avis sont partagés à ce niveau.
Les deux séances d’APP présentées sont scandées en
plusieurs phases/temps :
Les deux premiers temps apparaissent comme invariants :
a) un exposé/récit d’une
situation vécue par un exposant ;
b) un temps de
questionnement pour mieux cerner et s’approprier la situation.
Les phases suivantes varient selon les dispositifs
évoqués dans les échanges, induisant des modalités différentes :
c) émissions
d’hypothèse de compréhension par les
participants ou recherche de résolution de problèmes ou conseils de remédiation
ou recherche du modifiable ;
d)
conclusion par l'exposant ou synthèse par l’animateur.
Il est à noter que les séances présentées débutent
toutes deux par un temps/sas de parole/information libre.
C’est toujours une situation ou pratique
professionnelle vécue et contextualisée par un participant, source de
difficulté/problème ou de réussite qui est support à l'analyse collective.
Cet objet est généralement un «dire» sur un vécu
(récit différé). La question a été posée de
savoir s’il n’est pas plus pertinent d’analyser un
«faire» observé en direct ou filmé et les avis ont été partagés.
Au
cours des échanges la question a été posée de savoir dans quel(s) lieu(x)
institutionnel(s) pouvait se pratiquer ce type d'analyse de pratiques : un
établissement ? un bassin ? une circonscription ?. Il apparaît
qu'il n'y a pas de lieu idéal et que celui-ci dépend des contextes qui dans
tous les cas doivent permettre la mise en œuvre de l'APP selon les principes
incontournables évoqués précédemment.
De nombreuses questions ont été posées à propos de
l'animateur de tels groupes d'APP. est alors apparue la nécessité de clarifier
ses statuts, rôle, fonction par rapport à des questions de posture et de
pouvoir.
Des postures différentes ont été identifiées :
-
interventionniste
sur le fond et/ou la forme ;
-
conseiller/conseilleur
ou guide médiateur ;
-
animateur
ou formateur.
La question de l'expertise de l'animateur s'est
également posée. Doit-il être un "expert en APP" ? un expert en
théorie et/ou pratiques pédagogique/professionnelle ? un expert et/ou un
ex-pair ? des échanges il est ressorti que l’animateur doit être formé ou en
formation à l’APP (de préférence par l'analyse de sa pratique). La majorité des
participants s'accorde alors à dire que cette formation demande du temps, a minima un an, et que le nombre
d'animateurs formés et compétents, ressources sur lesquelles s'appuyer pour développer
des groupes d'APP, est peu important et qu'il conviendra donc de mettre en
œuvre des formations spécifiques d'animateurs.
Des questions ont été débattues autour de la
constitution de groupes d'APP. La mixité néo-titulaires/enseignants co-formés a
semblé plus pertinente que le regroupement des seuls débutants et ce du fait de
l'enrichissement lié à la diversité des expériences professionnelles.
Les avis ont été partagés sur le fait d’obliger des
débutants à participer à des groupes d’APP ou de bâtir des groupes sur les
principes du volontariat. Pour certains l'obligation tuerait l'authenticité de
l'analyse alors que pour d'autres elle permettrait de faire découvrir un
dispositif de formation inconnu ou source de résistance. Par contre la
participation assidue à un groupe d’APP apparaît comme nécessaire à
l'efficience de l'analyse elle-même.
Une autre question a été de savoir quels étaient les
objectifs de tels dispositifs. Il est ressorti qu'ils peuvent être différents
mais certainement complémentaires :
- recherche/élaboration de
compréhension d’un vécu professionnel ;
- développement de
l'identité professionnelle ;
- aide à des enseignants en
difficulté ;
- socialisation
professionnelle ;
- réinscription dans une
dynamique professionnelle ;
- thérapie professionnelle ;
- formation
permanente/formation accompagnante ;
- etc.
L'essentiel étant d'identifier et expliciter de
manière préalable les objectifs aux participants à un groupe d'APP.
Chemin faisant, les échanges ont font apparaître la
nécessité de clarifier/définir le (les) concept(s) d’APP : pratique
professionnelle ou pratique pédagogique ; analyse de pratique, analyse de
situations, étude de cas…
Un consensus s'est alors
dégagé sur le fait que le sens de toute APP doit être élucidé et
énoncé/explicité dans l'intérêt des participants mais aussi de l'animateur.
Pour une meilleure
appréhension, compréhension de tels dispositifs et pour favoriser leur
démultiplication les échanges ont montré qu'ils doivent être
identifiés/repérés, évalués (?) et ce :
- pour/sur les participants
(individus et groupe)
- pour/sur l’animateur
- pour/sur l’institution
La méconnaissance des effets
produits laisse la porte ouverte à des interprétations, des représentations,
voire des rumeurs infondées qui nuiraient au développement de tels dispositifs.
Au-delà
des cadres de références des dispositifs le dialogue avec les deux
intervenantes a montré que des techniques diverses d’animation, de
communication, d’analyse peuvent/doivent être utilisées par l’animateur :
- modalités de choix entre
plusieurs situations proposées
- usage du tutoiement ou du
vouvoiement
- animation directive,
semi-directive, coopérative…
- etc.
S'est posée alors la
question des compétences nécessaires à l'animation de groupes d'APP et par voie
de conséquence des formations nécessaires pour permettre l'acquisition de
telles compétences professionnelles.
Les participants à cet atelier en sont venus à
demander comment gérer/surmonter les difficultés institutionnelles liées à
l’organisation de groupes d’APP :
- trouver du temps commun à
des participants ayant des emplois du temps différents ;
- utiliser des modalités de
remplacement des enseignants du 1er degré ;
- gérer les
(in)disponibilités d’animateurs ;
- etc.
Aucune réponse miracle n'a
été apportée mais une incitation forte à gérer localement ces difficultés s'est
dégagée des échanges.
S'est également posée la
question des ressources nécessaires à la mise en ouvre de tels dispositifs :
- ressources humaines :
où trouver des animateurs compétents/formés ?
- ressources financières : comment traiter le coût de la mise en
œuvre de groupes d’APP répartis en 5 à 8 séances sur une année ?
- comment gérer la
massification/généralisation des dispositifs
d’APP ?
Un point de la discussion a
porté sur la double question qui se pose à l'institution :
- comment choisir des
dispositifs d’APP (sur quels critères) ?
- quels dispositifs choisir
parmi ceux existant à un niveau local ?
A ce niveau il faut avouer
que c'est le flou qui a régné dans la salle, flou semble-t-il lié d'une part au
manque de recul en matière d'APP, démarche encore peu répandue dans l'Education
nationale, et d'autre part à une non (re)connaissance des pratiques existantes
sur le plan local.
La discussion est
inéluctablement arrivée à poser le problème du peu de ressources en terme de
formateurs/animateurs de dispositifs d’APP, problème qui apparaît comme très
prégnant dès lors que l'on veut instituer, développer, voire massifier ces
dispositifs. Les participants se sont alors demandé :
Qui faudra-t-il
former ?
- des enseignants en
poste ?
- des formateurs en
poste ?
Qui formera ces
formateurs ?
- des formateurs de
l’éducation nationale ?
- des formateurs externes ?
Quels principes pour une
telle formation ?
Des réponses apportées on
pourra retenir que la formation à l’APP par l’APP apparaît presque comme un
postulat, une formation théorique ne suffisant pas et que du temps et une
progressivité sont nécessaires pour former des formateurs/animateurs d’APP
La conclusion des échanges
sur ce point peut se résumer en une double question : Ne faut-il pas envisager
un cahier des charges pour cette formation et penser également à un code de
déontologie de l’APP ?
A l'issue de cet atelier a
surgi une question de fond…
Les dispositifs d’APP
doivent-ils :
-
permettre
l’analyse de pratiques professionnelles ?
et/ou
-
former
à «savoir analyser sa pratique professionnelle» ?
La question est restée posée
ouvrant peut-être à une nécessaire réflexion première avant de vouloir former
des animateurs de groupes d'analyse de pratiques.
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