ACCOMPAGNEMENT

&

FORMATION ACCOMPAGNANTE

@  Patrick ROBO  ?

-  version du 01/03/2001 -

http://probo.free.fr/  -  patrick.robo@laposte.net

 

Connotations

Définitions

Actualisation

Des compétences nécessaires et des rôles

Des typologies d'accompagnement

Des typologies d’accompagnés

Des démarches d'accompagnement

Vers une formation accompagnante

Eléments pour une formation accompagnante

Vers des dispositifs de formation accompagnante

Des éléments repères

Questionnement

Bibliographie pratique

 

 

 

CONNOTATIONS

La démarche d'accompagnement n'est pas quelque chose de nouveau ; nous avons tous entendu parler d'accompagnement scolaire, d'accompagnement de projet, d'accompagnement d'équipe en projet, d'accompagnement des adolescents, des malades, des mourants...

Mais qu'en est-il de l'accompagnement dans le cadre de la formation des enseignants et/ou des formateurs dans l'Education nationale ?

 

Dès lors que l'on parle d'accompagnement, certaines notions, certains concepts, certaines idées viennent à l'esprit tels que : suivi, soutien, aide, guidance, conseil, assistance, tutorat, mentorat, parrainage, médiation, entraide, mutualisation, évaluation formative ou formatrice, mise en réseau, coopération, compagnonnage, régulation

 

DEFINITIONS

Le terme "accompagnement" est étrangement absent de la plupart des dictionnaires, encyclopédies et guides actuels relatifs à l'éducation et à la formation[1]. On en trouve une définition dans le Dictionnaire de la formation et du développement personnel[2] :

"Fonction qui, dans une équipe pédagogique, consiste à suivre un stagiaire, et à cheminer avec lui, durant une période plus ou moins brève afin d'échanger à propos de son action, d'y réfléchir ensemble et de l'évaluer (on dit parfois Qparrainagef, Qsupervisionf)"

Pour le Dictionnaire Universel Francophone En Ligne[3], l'accompagnement c'est "ce qui accompagne : servir du riz en accompagnement d'un plat de viande."

Quant à l'Encyclopédia Universalis, "La notion d’accompagnement est directement liée à l’état actuel de la musique…"

 

L'approche étymologique nous conduit vers le "compagnon" (à l'origine, celui qui partageait le même pain). Pouvons-nous, à cet instant, penser au compagnon, celui qui se situe entre l'apprenti et le maître, et qui, à son tour, pourra devenir maître ? Pouvons-nous penser à ce compagnonnage de corporation ? Pouvons nous penser au compagnonnage entre pairs ?…

 

ACTUALISATION

Aujourd'hui, cette idée d'accompagnement apparaît pourtant de plus en plus dans des textes officiels et dans des publications relatives aux Sciences de l'Education.

 

þ Ainsi dans la conférence de presse du Ministre de l'Education Nationale de Février 2001 nous pouvons lire :

"Evidemment, la formation ne s’arrête pas à la fin de la deuxième année d’IUFM : les jeunes professeurs, qui peuvent éprouver des difficultés dans l’exercice d’un métier difficile, ont besoin d’un accompagnement au moment de leur entrée dans le métier ; la formation donnée alors est d’autant plus profitable qu’elle répond à des problèmes rencontrés et à des difficultés éprouvées. J’ai décidé que cet accompagnement dans le métier se ferait pendant la première et pendant la deuxième année d’exercice. Cela complétera efficacement la formation dispensée en IUFM et préparera la participation à la formation continue."

(…) " Par ailleurs tous les professeurs des écoles stagiaires effectueront un stage de pratique accompagnée."

(…) " Sur toutes ces questions, seule la formation qui accompagne l’entrée dans le métier est pertinente. Elle prend sens réellement au niveau de l’école ou de l’établissement et répond à des besoins qui naissent de la pratique professionnelle quotidienne."

(…) " Dans cet esprit, l’accompagnement de l’entrée dans le métier constitue un enjeu essentiel. Prenant appui sur les personnels d’encadrement, il doit aider l’enseignant à comprendre le sens et la cohérence des réformes engagées."

(…) " L’accompagnement à l’entrée dans le métier devra revêtir les formes diversifiées nécessaires à son efficacité. Il s’agit de considérer l’enseignant débutant comme un enseignant responsable à part entière, mais qu’il convient d’accompagner de manière adéquate. Ainsi, il pourra lui être proposé, par exemple : l’alternance d’une aide collective et individuelle, des stages présentiels si nécessaire, mais aussi des échanges guidés entre jeunes enseignants comme avec des enseignants plus expérimentés. Pourront être envisagées toutes formes utiles au sein desquelles l’enseignant débutant peut prendre une distance réflexive par rapport à sa pratique, l’analyser, la confronter à d’autres, disposer d’interlocuteurs capables de l’aider à trouver des solutions.

Afin de compléter le dispositif, un enseignant « accompagnateur » ou « référent », susceptible de venir en aide au jeune enseignant, sera identifié dans chaque école ou établissement scolaire."

(…) " Au-delà de cette formation initiale confortée et de cet accompagnement systématique de l’entrée dans le métier, je souhaite également que la formation continue des enseignants voit son rôle réaffirmé et ses modalités de mise en œuvre renouvelées."

(…) " Tout cela s’accompagne d’un déplacement du rôle de l’enseignant qui est au moins en partie, déchargé de son rôle d’apport d’information pour se recentrer sur ce qui est la définition de sa mission : accompagner la construction du savoir par les élèves."

(…) " Je souhaite que la formation continue puisse également encourager le développement de tous les talents. Les enseignants doivent être accompagnés dans le développement de leur carrière comme dans leurs éventuels projets de mobilité et de préparation à l’exercice possible de nouvelles fonctions."

 

þ Egalement dans la note de service du 18/04/1996 relative aux missions et fonctions des Conseillers Pédagogiques de Circonscription nous pouvons lire :

(…) "Il a été décidé que les enseignants bénéficieraient d'une assistance et d'un suivi au cours de leur première année d'affectation.

(…) Le C.P.C. a pour fonction première l'assistance et le suivi des enseignants débutants, notamment au cours de leur première année d'affectation.

(…) Il assiste les équipes enseignantes (…) Il soutient la mise en œuvre d'activités nouvelles et accompagne les équipes d'enseignants.

(…) Il accompagne les enseignants dans leurs pratiques quotidiennes, en priorité les nouveaux nommés : il les aide à utiliser, compléter et affirmer les compétences qu'ils possèdent déjà.

(…) Il convient que le C.P.C. assure sa fonction essentielle d'aide et de conseil, ce qui inclut un travail de médiation, de négociation et d'aide."

 

þ La récente circulaire du 20/01/1999 relative à la Relance de l'éducation prioritaire précise dans le dixième point intitulé "améliorer l'accompagnement des enseignants et créer les conditions d'un pilotage plus performant" :

" – l'accueil, le soutien et la formation des équipes :

(…) de plus, il convient d'accorder une attention toute particulière aux nouveaux arrivants. (…) encourager le parrainage des nouveaux affectés, entraide en direction de ceux-ci.

(…) la formation des équipes doit leur apporter une aide pour réussir avec les élèves, pour faciliter la mise en commun de pratiques et pour les évaluer.

Des groupes d'analyse de pratiques, de recherche-action, et des réseaux coopératifs sont de nature à permettre aux équipes d'élargir leur champ de réflexion."

 

þ Dans "Le Monde - La lettre de l'Education n°263 du 15/3/99" il est fait référence à Claude ALLEGRE indiquant, lors de la conférence des directeurs d'IUFM le 11 mars, que "les sortants de l'I.U.F.M. devront être suivis par groupe de sept ou huit, pendant trois ans, par des formateurs. Un rendez-vous obligatoire les accompagnera plusieurs fois dans l'année pendant leur début de carrière."

 

þ Déjà en 1986, Pierre DUCROS et Diane FINKELSZTEIN[4] dans L'école face au changement nous présentent "Des stratégies de diffusion et d'accompagnement des innovations scolaires" en particulier avec "un modèle de dispositif de ressources efficace pour l'aide à la professionnalisation des enseignants (stratégie de réseau)" où "il ne s'agit pas de donner des cours ou d'apporter des solutions toutes faites" mais plutôt de "tisser des liens et de traiter rapidement les demandes qui seront formulées", et de "travailler selon une logique de résolution de problèmes".

 

þ Guy LE BOTERF[5] traite de "la fonction d'accompagnement d'un processus de formation-action", fonction pédagogique qui vise essentiellement à :

-         aider le groupe-acteur à nommer ce qu'il fait et repérer les difficultés qu'il rencontre (activité de conceptualisation);

-         mettre le groupe-acteur en relation avec des ressources ;

-         fournir des apports directs de connaissances ;

-         aider le groupe-acteur à faire le point sur sa démarche et sa progression.

 

þ En 1994, Michel DEVELAY M., dans Peut-on former les enseignants ?[6], écrit à propos du mode de formation personnalisée : "La personnalisation de la formation vise à aller au-delà de la prise en compte de l'individu pour s'intéresser aux personnes, dans leurs dimensions culturelles, mentales, affectives et dans leurs rôles sociaux[7]. Il s'agit donc de penser la formation comme individualisée, dans le sens d'une auto-formation assistée mais de surcroît en faisant exister des temps non seulement d'assistance - avec ce que ce vocable possède de technique - mais des temps d'accompagnement - de «compagnon», qui partage son pain avec. Ainsi, si auto-formation assistée conduit au plan logistique à faire exister des centres de ressources performants et des formateurs capables d'assistance technique, la formation personnalisée conduit au plan logistique aux mêmes obligations, en substituant au formateur technicien, un formateur accompagnateur. Il s'agit de créer en formation les conditions de la rencontre entre un «se formant» et son accompagnateur, associés à une tâche commune qui est d'identifier ce qui fait problème, d'adopter alors une attitude de formulation d'hypothèses qui simultanément s'appuie sur un lieu de ressources et se rend attentive aux contraintes de la situation à démêler, d'envisager alors des possibles, de mettre en actes ses choix en s'étant accordé les moyens de son action. On conçoit, dans cette perspective, qu'une formation personnalisée entretienne des proximités avec la dimension psychologique que nous avons développée précédemment car elle peut permettre d'analyser la nature des relations d'identification qui se jouent dans tout accompagnement."

Michel DEVELAY précise les caractéristiques du formateur pour une Formation personnalisée : "C'est un accompagnateur vivant avec le formé une plus grande proximité car se sentant partie prenante de sa formation"[8].

 

þ En 1997, une Université d'Eté s'est tenue sur le thème "Accompagnement et formation" ; elle a donné lieu à publication d'actes[9] sous la direction de Georges CHAPPAZ, actes dans lesquels nous pouvons lire :

 

"Se développe une nouvelle fonction que l'on nomme accompagnement qui vise entre autres à aider le sujet à construire des liens qu'il ne saurait établir spontanément seul.

Cette nouvelle fonction de médiation, selon WINNICOTT, met à la disposition de l'autre un appareil psychique différent et plus performant.

Toutefois, elle implique de la part de l'accompagnateur des compétences d'écoute, d'aide à l'explication et d'aide à la prise de décision."

 

Pour Gérard VERGNAUD[10], cité dans cet ouvrage :

"La nouvelle problématique à laquelle les enseignants, les formateurs, les chercheurs sont confrontés aujourd'hui et de rechercher des modalités pratiques d'articulation entre des temps "courts" (ceux de la classe, du programme, des élèves en situation "ici et maintenant") et des temps "moyens ou longs" qui sont ceux du développement… réussir cette articulation est aujourd'hui le plus grand défi qui est posé tant aux chercheurs qu'aux praticiens."

 

Nous percevons déjà qu'à la notion d'accompagnement est associée l'inscription dans le temps/durée. Nous référant à Jacques ARDOINO, nous dirons qu'avec une telle approche il y a inscription dans un "projet-visée" et non dans un "projet-programmation".

 

Pour Mireille CIFALI[11], dans son intervention intitulée "Une altérité en acte" :

Accompagner : au minimum c’est “aller avec”. Nous sommes dans l’efficience d’une intersubjectivité. L’autre compte, il y a de la relation en acte, on se meut et on se déplace sur un chemin qui est d’abord le sien. Celui qui accompagne occupe une position particulière, où les problèmes de l’altérité se présentent aigus, exigeants et incontournables.

Chaque fois où quelqu’un est confronté à une expérience, un projet qui exige pour aboutir son engagement à nul autre substituable, un accompagnement peut être une posture adéquate. Il y a cependant des écueils et des extrêmes à éviter, des leurres à perdre. Entre dépendance et solitude, où se situe l’accompagnement ? Et quelle est cette position ? Aide, soutien, guide, pourvoyeur d’outils, de repérages, de références ... On y navigue forcément entre imposition et autorisation.

Quelque soit la difficulté ou l’épreuve, l’accompagnant a la nécessité de s’y repérer pour ne pas sombrer avec, d’être dedans mais aussi dehors, de s’engager sans s’y perdre : travail psychique afin de maintenir une bonne distance, une juste mesure. Certaines qualités d’être et de savoir sont importantes : fiabilité, authenticité, sincérité, discernement, fidélité, capacité de sortir de soi, intelligence de l’instant sont nécessaires. Acquiert-on, et comment, la capacité d’accompagner ? Faut-il avoir été soi-même très loin dans la quête du savoir, dans le repérage de vie, dans l’expérience professionnelle ? L’accompagnement convoque sans nul doute une sagesse et une éthique particulière, un rapport spécifique au savoir et une mobilisation particulière de la théorie. En quoi la notion de “démarche clinique” aide-t-elle à nous y repérer ?

On écrit un accompagnement à la première personne et on y intègre un “tu” ou un “vous”. L’auteur y est donc invariablement un “nous”.”

 

Accompagner c'est "savoir être là", c'est "être pris dans une énigme", c'est "être intelligent dans les situations singulières" ce qui nécessite des "connaissances extraites des sciences humaines" mais aussi des "compétences relationnelles". C'est "construire des connaissances à même le vivant". C'est "restituer à celui qui est tellement engouffré dans le présent son rapport à un passé et un futur". C'est "être fiable" et "accepter l'incertitude"

Accompagner c'est "aller avec", "être à côté de", "donner une place à l'autre" ; c'est "intégrer le fait que l'on ne peut pas agir et décider à la place de quelqu'un", "s'éloigner de la prise de pouvoir qui peut advenir si facilement dans nos métiers".

Pour qu'il y ait accompagnement il faut qu'il y ait demande. (mais comment travailler avec ceux qui ne demandent rien, qui sont en résistance passive ?)"

 

Cet accompagnement, pour Mireille CIFALI, trouve tout son sens dans la démarche clinique qu'elle met en avant, démarche qui permet entre autre de construire des savoirs de la pratique avec les acteurs ou, selon l'expression médicale, "au chevet du patient".

 

þ Marc DENNERY[12] s'interrogeant sur "Comment appliquer les connaissances acquises à la suite d'une formation" parle de tutorat, de parrainage, d'accompagnement par le responsable hiérarchique, par le formateur externe ou par l'expert pour "transformer des connaissances théoriques ou pratiques en compétences maîtrisées, c'est-à-dire en savoir, savoir-faire et savoir-être immédiatement mobilisables dans une situation professionnelle donnée".

Pour lui, l'accompagnement par le responsable hiérarchique n'est peut-être pas le plus simple à mettre en œuvre ni celui qu'il faut développer le plus (...) la relation hiérarchique induit parfois des comportements qui peuvent entraver le bon déroulement du coaching. Il évoque la nécessaire préparation - formation des responsables hiérarchiques à l'accompagnement.

 

þ Dans la revue profession formateur consultant n° 2 – 1998, il est question de coaching ou accompagnement individualisé et de team-building ou accompagnement d'un groupe, d'une équipe. Le LAROUSSE fournit comme définitions relatives à ces deux termes :

 

- ACCOMPAGNEMENT ou TEAM-BUILDING :

Action d'accompagner et de guider un groupe ou Aider les équipes à développer simultanément leur efficacité et leur harmonie (Le Larousse).

- COACHING ou ACCOMPAGNEMENT INDIVIDUALISE :

Action de conseil individuel, d'accompagnement de collaborateurs, quel que soit leur domaine d'activité professionnel, qui vise à les aider à se développer. (Le Larousse).

 

Le coaching permettant à l'accompagné de :

-     "comprendre les relations aux autres et de développer ses propres capacités ;

-     pouvoir dire dans un cadre protégé ce que l'on ne peut pas, ne sait pas, ne doit pas dire ailleurs ;

-     pouvoir entendre ce que l'on ne peut, ne veut pas entendre, comprendre ailleurs ;

-     pouvoir être stimulé dans la co-action, c'est-à-dire encourager."

 

Mais pour Jean-Yves ARRIVÉ, directeur pédagogique et maître de conférence, "rien de surprenant à ce que le coaching fasse l'objet de controverse : son introduction dans l'entreprise est récente. (…) Il reste aussi des tabous à briser, l'un d'eux résiste plutôt bien : un dirigeant, un manager qui sollicite une aide, un conseil, une écoute, est souvent jugé comme faible, indéterminé, parfois même incompétent. Cela doit changer."

 

þ Dans le rapport qui porte son nom, le Recteur PAIR écrit[13] :

"Le pilotage n'est donc pas seulement décision mais aussi régulation. Pour sortir de la “bureaucratie qui se nourrit de la non connaissance des situations particulières, la régulation doit avoir un caractère de proximité : elle est accompagnement. Un responsable ne peut donc l'exercer que pour un nombre relativement réduit d'unités ou de personnes.

(...)

Le rôle des équipes de circonscription

L'accompagnement des enseignants, en particulier débutants, par l'équipe de circonscription (inspecteur et conseillers pédagogiques) constitue une richesse du premier degré, qui manque cruellement dans le second degré[14].

(...)

Ce qui doit évoluer

Un accompagnement de l'action des enseignants pas assez continu :

Le premier niveau de régulation est la circonscription dirigée par un IEN : en effet, les directeurs d'école n'ont aucune prérogative en ce domaine. Or un IEN a la responsabilité de 300 enseignants en moyenne, qui en milieu rural peuvent travailler dans plus de 70 écoles. Ces nombres sont trop élevés pour permettre, non pas un pilotage de nature hiérarchique, mais une régulation qui soit un accompagnement continu et se traduise par de véritables échanges entre les enseignants et leur responsable. Cette insuffisance est une seconde explication des difficultés signalées plus haut dans l'application des politiques définies au cours des dernières années et de la faiblesse des résultats de certains enfants."

 

þ Dans les travaux et réflexions des stages P.N.F., il est aussi question d'accompagnement. Ainsi, par exemple, dans la fiche guide de stage du document méthodologique produit en 1997[15], nous lisons :

- Envisager un accompagnement sous des formes différentes :

Ÿ groupes d’analyse de pratiques,

Ÿ animation pédagogique pour approfondissement,

Ÿ stage "deuxième niveau",

Ÿ éventuellement accompagnement individuel, à la demande...

Jacques LEVINE, au cours de son intervention dans ce stage a évoqué le groupe de "soutien au soutien" qui est d'abord un groupe d'accompagnement voulant rompre l'isolement des enseignants qui viennent s'y ressourcer (effet de ressourcement interne).

 

þ Pour terminer ici cette actualisation, j'évoquerai la nouvelle collection éditée par le C.R.D.P. de MONTPELLIER dont le titre est "ACCOMPAGNER" et dont les objectifs sont "d'accompagner notamment les innovations dans le système éducatif, de montrer la diversité des pratiques et des approches pédagogiques, privilégiant l'ouverture sur la pluralité des usages et évitant la rigidité des figures imposées."

 

L'idée d'accompagnement est donc bien présente dans le milieu éducatif, dans le monde enseignant ; elle concerne des personnes, des groupes, des dispositifs, des projets… Elle s'inscrit dans une relation d'aide dans la proximité et la durée. Mais accompagner l'Autre relève-t-il de l'innéité ?

 

DES COMPETENCES NECESSAIRES ET DES ROLES :

Ceux qui parlent d'accompagnement évoquent, comme CHAPPAZ et CIFALI en particulier, des compétences nécessaires à tout accompagnateur.

Pour Marie-José LACROIX, formatrice-consultante et coach[16] :

"Le formateur se situe au niveau de l'expertise d'un savoir et d'une qualité d'animation. En ce sens il est plutôt centré sur un contenu et une relation.

Dans le coaching, la compétence du coach se situe certes dans sa formation, ses expériences, ses savoirs, sa culture, mais plus encore dans son être, dans sa capacité à accueillir totalement l'autre pour ce qu'il est, ainsi qu'à l'accompagner sans jamais se substituer à lui. (…) Parler moins, écouter plus, entendre mieux ; au lieu d'apporter les "bonnes" réponses, poser les bonnes questions."

 

Beaudour ALLALA[17] quant à lui liste une série d'aptitudes nécessaires au coach :

-     "Ecoute active

-     Compréhension

-     Mobilisation des ressources

-     Médiation

-     Sens aigu de la psychologie humaine

-     Faculté d'observation

-     Lucidité vigilante

-     Objectivité

-     Conscience de soi

-     Perception de la réalité

-     Patience…

Excellent conseiller plutôt qu'expert, ajoute-t-il, l'accompagnateur doit être, en quelque sorte, le miroir de l'accompagné pour qu'il y reflète sa situation actuelle."

 

Jacques LEVINE évoque le "deuil de la toute puissance" et le "renoncement à vouloir modifier l'Autre" qui devrait déboucher sur "la recherche du modifiable avec l'Autre".

 

Pour Marc DENNERY[18], le coach, l'accompagnateur doit exercer quatre rôles principaux :

              écouter (s’intéresser à l’Autre, accepter l’Autre, rechercher activement de l'information, renvoyer à l’Autre ce qu'il induit).

              orienter ("plutôt que de lui donner le poisson, apprends-lui à pêcher" : aider à traduire les connaissances acquises, à définir les objectifs, à évaluer les résultats)

              - sponsoriser (rendre l'environnement du stagiaire réceptif, devenir le supporter, ouvrir les portes)

              - reconnaître et encourager.

 

Gérard WIEL dégage quatre fonctions pour l'accompagnateur :

      - écouter

      - clarifier

      - proposer

      - aider à décider

ces fonctions permettant, à une personne ou une équipe, par la médiation de l'écoute, de l'analyse systémique, de l'analyse de pratiques, de passer d'un état à un autre par une ou des transformation(s) dans le cadre d'une institution et sur une durée.

 

Il apparaît donc que l'accompagnement se fonde sur des valeurs et des principes que l'on puisera en particulier dans le constructivisme et l'humanisme et qui pourraient laisser penser à une déontologie de l'accompagnateur.

 

 

DES TYPOLOGIES D'ACCOMPAGNEMENT

Après ces premiers éclaircissements, nous pourrions nous demander en quoi consiste ou devrait consister l'accompagnement d'enseignants. L'expérience et l'analyse de pratique fait apparaître plusieurs champs d'accompagnement :

- l'accompagnement pédagogique (dans les dimensions éthiques, éducatives, didactiques, praxéologiques, etc.)

- l'accompagnement psychologique (soutien, encouragement, gratification, etc.)

- l'accompagnement matériel (prêt de documents, d'outils, etc.)

- l'accompagnement social (intégration à un groupe, travail en équipe, etc.)

- l'accompagnement professionnel (aide à une qualification, développement de compétences, etc.)

- l'accompagnement formatif (cf. l'évaluation formative/formatrice et la Zone Proximale de développement)

- ...

 

 

DES TYPOLOGIES D’ACCOMPAGNÉS

La question peut se poser de savoir qui accompagner, qui a besoin d’accompagnement ? A cette question, plusieurs réponses problématisantes possibles. L’accompagnement peut concerner :

> un enseignant débutant dans la profession et/ou dans une pratique pédagogique ;

> un enseignant qui rencontre des difficultés dans son métier d’enseignant/éducateur, sachant qu’il y a :

·       les enseignants qui ont conscience de leur difficulté avec

*     ceux qui osent l’exprimer ;

*     ceux qui n’osent pas l’exprimer ;

·       les enseignants qui n’ont pas conscience de leur difficulté et dont l’entourage en a parfois conscience ;

> un enseignant qui souhaite améliorer, modifier sa pratique ;

> un enseignant qui souhaiterait mener une recherche

> un enseignant qui souhaite une professionnalisation par une qualification nouvelle (par exemple passer le CAFIMF)

> etc.

 

 

DES DEMARCHES D'ACCOMPAGNEMENT

A y regarder de plus près, il apparaît diverses démarches d'accompagnement de la part d'un accompagnateur qui agira seul ou avec d'autres, qui s'adressera à un enseignant seul ou avec d'autres.

Cet accompagnement pouvant être direct ou indirect (par le biais de médiations).

 

 

 

DEMARCHES D'ACCOMPAGNEMENT

 

Accompagnement direct

(relation duelle ou groupale)

Accompagnement indirect

Accompagnement "seul"

(JE)

par le formateur accompagnateur

par un tiers-personne

(parrain, tuteur, mentor...)

 

Accompagnement à plusieurs (NOUS)

par des formateurs

accompagnateurs

par un tiers-objet

(document, outil...)

par un tiers-action

(action de formation...)

 

 

VERS UNE FORMATION ACCOMPAGNANTE

D'aucuns pourraient penser qu'il y aurait d’abord formation puis accompagnement. Ils n'auraient pas tort à regarder ce qui se passe la plupart du temps dans l'éducation nationale : on forme les enseignants dans une formation initiale qui s'arrête souvent à la sortie d'un centre de formation ; on les forme ensuite dans de stages dits de formation continue (36 semaines dans la carrière) ; mais combien de stages dits de « retour » ou de « niveau 2, niveau 3 » dans le cadre de la Formation Continue ?

Certains évoquent aussi les temps de « conférence ou d’animation pédagogique » mais ceux-ci ne sont pas toujours voulus ou déclinés comme temps de formation.

 

Nous savons tous que dans une démarche de formation personnelle, même s’il y a un temps d’auto-formation, d’autodidaxie, il n’est pas toujours possible de programmer un temps de «formation-stage» au moment où le «en formation» en a besoin pour avancer avec d’autres, pairs ou experts.

Il apparaît dans tout curriculum ce besoin de formation à un moment précis ou tout au long d’une durée particulière qui n’est pas forcément celle d’une stage «borné» dans le temps.

 

A ce niveau et à la lumière de ce qui précède au sujet de l’ACCOMPAGNEMENT, nous pourrons parler d’un autre type de formation pensée, pourquoi pas programmée ou contractualisée, qui serait une FORMATION ACCOMPAGNANTE.

 

Quels sont les dispositifs institutionnels actuels repérables, généralement mis en avant et qui pourraient être déclinés dans cette typologie ? Sont évoqués :

- les visites en classe (avec 2, 3 ou 4 étapes) ;

- les inspections ;

- des animations pédagogiques ;

- la relation duelle, privilégiée entre certains enseignants et formateurs.

 

En existe-t-il d’autres ? Conviendrait-il d’en envisager d’autres, existants ou à créer, mettre en oeuvre ? Avant de répondre à cette double question nous pouvons nous interroger sur des éléments nécessaires à une formation accompagnante.

 

 

ELEMENTS POUR UNE FORMATION ACCOMPAGNANTE

Le travail mené avec des formateurs, conseillers pédagogiques en particulier, fait apparaître deux niveaux d’éléments qui permettraient, favoriseraient une formation accompagnante :

 

 

 

 

Des dispositions :

Des dispositifs :

l’accompagnement

banque de données

l’analyse

cahier de roulement

l’assistance

cellule écoute

l’échange

centre de ressource

l’écoute

enseignants relais

l’individualisation

enseignants ressource

l’intégration

groupe d’analyse de pratiques

la co-formation

groupe de parole

la communication

hot-line pédagogique

la mutualisation

projet pédagogique

la personnalisation

liste de diffusion (internet)

la valorisation

livret d’accompagnement

le tutorat

réseau d’entraide

la médiation

tutorat

la régulation

stages

l'entraide

formation-action

etc.

etc.

 

Ces dispositions trouvent leurs fondements dans une éthique, des valeurs (solidarité, confiance, etc.) des principes (sécurité, confidentialité, etc.) et pourraient donner lieu à l’émergence d’une déontologie de la formation accompagnante.

Les dispositifs et dispositions signalés s’inscrivent dans un cursus, une durée qui peuvent/devraient être limités dans le temps.

 

 

VERS DES DISPOSITIFS DE FORMATION ACCOMPAGNANTE

Au-delà de dispositifs signalés plus haut une réflexion plus avancée sur la Formation Accompagnante dans le premier degré fait émerger d’autres dispositifs connus ou non qui pourraient trouver leur place dans l’institution Education nationale telle qu'elle est à ce jour.

 

Nous listerons ici, sans hiérarchie aucune, un ensemble de dispositifs possibles :

 

· le stage initialisant ;

·le stage d’adaptation au poste ;

·le stage de formation continue ;

·le parcours personnalisé de formation ;

·le groupe de parole ;

·le groupe d’analyse de pratiques (GEASE, GAP, GFAPP, etc.)

·le réseau d’échanges ;

·le parrainage ;

·le tutorat ;

·la formation-action en alternance ;

·la recherche-action (à partir du mémoire professionnel par exemple) ;

·le suivi individualisé ;

·la visite en classe[19] ;

·les visites mutuelles de classes ;

·l’accompagnement de projet ;

·une cellule d’écoute ;

·une "hot line" pédagogique ;

·les aides informelles ;

·etc.

 

Parmi les moyens et techniques au service de ces dispositifs nous indiquerons :

¨    l’écriture sur sa pratique ;

¨    le cahier de roulement[20] ;

¨    le livret d’accompagnement (à partir du référentiel de compétences) ;

¨    l’informatique ;

¨    l’internet ;

¨    la liste de diffusion ;

¨    la banque de données ;

¨    l’observation ;

¨    l’entretien ;

¨    le compte-rendu écrit ;

¨    l'alternance ;

¨    etc.

 

DES ELEMENTS REPERES

Pour G. WEIL[21], l'accompagnement prend sens autour de cinq concepts :

-         un projet ;

-         une demande authentique ;

-         une durée, à limiter dès le départ ;

-         l'extériorité de l'accompagnateur, dans le "non pouvoir", le "non enjeux affectif" ;

-         la liberté des acteurs, de demander, de décider.

 

G. WEIL énonce sept actions – clés pour "introduire un dispositif d'accompagnement dans une institution, dispositif compatible avec celui de la formation" :

-         Clarifier la demande ;

-         Eclairer la demande : préciser le rôle de l'accompagnateur qui "aide à l'émergence, à l'élaboration, à la gestion, à l'évaluation du projet" ;

-         Structurer le parcours d'accompagnement en fixant sa durée (trois ans au maximum) : vers le "deuil de l'accompagnement" ;

-         L'évaluation du projet et des effets sur la pédagogie et les personnes ;

-         Les temps inter – rencontres, points forts de la pratique d'accompagnement (les rencontres servant à éclairer, réguler, décider) ;

-         L'animation qui doit appartenir à l'accompagnateur (il écoute les personnes) ;

-         Le relais institutionnel qui rend possible la demande et la mise en œuvre de l'accompagnement.

 

 

QUESTIONNEMENT

 

A ce jour, ici et maintenant, nous pouvons peut-être nous interroger et réfléchir sur :

ü      Quelles possibilités institutionnelles (textes, statuts, moyens, dispositifs…) permettent de mettre en œuvre une formation accompagnante ;

ü      Quels objectifs spécifiques attribuer à chaque dispositif d'accompagnement ;

ü      Quelles compétences nécessaires à un "formateur – accompagnateur" ? ;

ü      Quels dispositifs de formation accompagnante choisir, créer, mettre en œuvre, expérimenter…?

ü      Quelle formation cohérente de formateurs-accompagnateurs ?

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE PRATIQUE

 

Aumond-Berlencourt C., Innovez ! de l'injonction à l'accompagnement organisé, ESP,  1992.

BOUVIER et OBIN, La formation des enseignants sur le terrain, Paris, Hachette.

CHAPPAZ G., (sld)  Accompagnement et formation, Marseille, CRDP et Université de Provence, 1998.

DENNERY M., Organiser le suivi de la formation ; méthodes et outils, Paris, ESF, 1997.

DEVELAY M., Peut-on former les enseignants ?, ESF, Paris, 1994

DUCROS P. et FINKELSZTEIN D., L'école face au changement, Grenoble, CRDP et MEN, 1986.

LE BOTERF G., L'ingénierie et l'évaluation de la formation, Paris, Les éditions d'organisation, 1993.

LE BOUEDEC G. et al., L’accompagnement en éducation et formation, Un projet impossible ?, Paris, L’Harmattan, 2001.

WIEL G., Sortir du mal-être scolaire - Promouvoir la fonction accompagnement, Saint-Etienne, Chronique sociale, 2000.

CRESAS, On n'enseigne pas tout seul, INRP, 2000.

 

▲ ▲

HAUT DE PAGE



[1] : Dictionnaire actuel de l'éducation, 2ème édition, Paris, ESKA, 1993.

   Dictionnaire encyclopédique de l'éducation et de la formation, Paris, NATHAN, 1994.

   MARC E., GARCIA-LOCQUENEUX J. (sld), Guide des méthodes et pratiques en formation, Paris, RETZ, 1995.

   CHALVIN D., Encyclopédie des pédagogies de formation – Tome 2 Méthodes et outils, Paris, ESF, 1996.

[2] : Dictionnaire de la formation et du développement personnel, Paris, ESF, 1996.

[3] : Le Dictionnaire Universel Francophone En Ligne, accessible sur le site http://www.francophonie.hachette-livre.fr/, est constitué de la partie "noms communs" du Dictionnaire Universel Francophone des Éditions Hachette Edicef, ouvrage imprimé.

[4] : DUCROS P. et FINKELSZTEIN D., L'école face au changement, Grenoble, CRDP et MEN, 1986.

[5] : LE BOTERF G., L'ingénierie et l'évaluation de la formation, Paris, Les éditions d'organisation, 1993.

[6] : DEVELAY M., Peut-on former les enseignants ?, ESF, Paris, 1994, p. 139.

[7] : POSSOZ D., Des expressions polysémiques : "individualisation, personnalisation" de la formation, dans L'actualité de la formation permanente, n° 114, 1991.

[8]  : DEVELAY M., op. cit., p. 140.

[9]   : CHAPPAZ G., (sld)  Accompagnement et formation, Marseille, CRDP et Université de Provence, 1998.

[10] : Directeur de Recherche au C.N.R.S.

[11] : Professeur à la Faculté de psychologie et des Sciences de l'Education de l'Université de Genève, et psychanalyste.

[12] : DENNERY M., Organiser le suivi de la formation - Tome 2 :  méthodes et outils, Paris, ESF, 1997.

[13] : Notamment dans le chapitre 3.

[14] : Sur le rôle des inspecteurs depuis leur création en 1835, voir la thèse de J. Ferrier, Les inspecteurs de l’enseignement primaire, Université de Bourgogne, 1995.

[15] : Stage P.N.F. à BOISSERON (34) sur le thème de "L'Education civique".

[16] : in Profession Formateur Consultant n° 2 – 1998

[17]: in Profession Formateur Consultant n° 2 – 1998

[18]: op. cit.

[19]  Cf. "Eléments pour des visites de Formation Accompagnante à l'usage des Formateurs et des Stagiaires" annexés en fin de document.

[20] : Cf.  Fiche-guide pour un cahier de roulement annexée en fin de document.

[21] : op. cit.

HAUT DE PAGE